Le président Barack Obama a salué les réformes au Yémen tout en appelant le régime à la retenue vis-à-vis de la contestation, traduisant la prudence des États-Unis face à une situation qui, comme en Égypte, pourrait à terme les mettre en porte-à-faux.

Des dizaines de milliers de partisans de l'opposition yéménite ont manifesté dans le calme jeudi à Sanaa pour réclamer un changement de régime, au lendemain de concessions annoncées, sous la pression de la rue, par le président Ali Abdallah Saleh, un allié clé de Washington dans sa lutte contre Al-Qaïda.

M. Obama a appelé son homologue mercredi «pour saluer les mesures de réforme importantes que le président Saleh avait annoncées le même jour, et lui a demandé de tenir ses promesses en prenant des mesures concrètes», a indiqué jeudi la Maison-Blanche.

En outre, «le président Obama a demandé que les forces yéménites fassent preuve de retenue et s'abstiennent de toute violence contre les manifestants qui exercent leurs droits d'association, de rassemblement et de liberté d'expression».

Le plus grand rassemblement jamais vu contre le régime du président Saleh s'est produit jeudi, au moment où une révolte populaire sans précédent, réprimée dans la violence, réclamait le départ d'un autre allié capital des Américains au Moyen-Orient, le président égyptien Hosni Moubarak, lui aussi au pouvoir depuis trois décennies.

Comme en Égypte, les États-Unis doivent jongler avec deux impératifs a priori incompatibles: une stabilité politique qui garantirait leurs intérêts et le respect des principes démocratiques, au risque de voir à terme l'installation d'un pouvoir qui leur serait hostile.

M. Saleh a annoncé mercredi qu'il ne briguerait pas de nouveau mandat à l'expiration du sien en 2013 et a promis de ne pas transmettre le pouvoir à son fils.

Selon la Maison Blanche, M. Obama a profité de la conversation de mercredi pour redemander aux autorités yéménites d'agir «résolument contre Al-Qaïda dans la Péninsule arabique (Aqpa) pour protéger des vies innocentes tant au Yémen qu'à l'étranger».

M. Obama a aussi «exprimé son inquiétude» au sujet d'un journaliste proche de l'imam radical Anwar Al-Aulaqi, soupçonné d'avoir fomenté des attentats aux États-Unis. Le président Saleh a ordonné mardi la libération de ce journaliste, Abdel Ilah Shaea, moins de deux semaines après sa condamnation à cinq ans de prison.

La présidence américaine a par ailleurs assuré que le président Saleh avait «remercié le président (Obama) pour le soutien des États-Unis» et s'était engagé à renforcer ses relations avec eux.

Mi-décembre, le conseiller de M. Obama pour l'antiterrorisme, John Brennan, avait affirmé qu'une «saine tension» régnait entre Washington et Sanaa, après la publication par WikiLeaks de câbles évoquant l'exaspération du président Saleh vis-à-vis des raids américains contre Al-Qaïda dans son pays.

Ces dépêches diplomatiques avaient révélé que le président Saleh couvrait les opérations militaires américaines contre Al-Qaïda en les faisant passer pour des bombardements par ses propres forces.

Les menaces d'attentat en provenance du Yémen se sont multipliées depuis plus d'un an. C'est du Yémen, pays le plus pauvre de la région, qu'Al-Qaïda a envoyé fin octobre des colis piégés destinés aux Etats-Unis et découverts avant qu'ils n'explosent.

C'est aussi du Yémen qu'est parti le jeune Nigérian qui a tenté de faire sauter un avion en route pour Detroit (nord des Etats-Unis) le jour de Noël 2009. Le dispositif n'avait pas fonctionné.