Des milliers de migrants pressés de gagner l'Europe du Nord étaient bloqués samedi dans les Balkans de l'Ouest, Croatie, Hongrie et Slovénie se les renvoyant, divisés face à cet exode qui ne tarit pas.

Marchant à travers champs, des centaines continuaient d'arriver depuis la Serbie en Croatie, devenue la nouvelle route de leur exil depuis que la Hongrie a verrouillé sa frontière.

Budapest a annoncé samedi avoir achevé la pose de barbelés sur 41 km de sa frontière avec la Croatie. Une clôture pas complètement hermétique, selon les correspondants de l'AFP. La Hongrie en avait déjà érigé une sur les 175 km de sa frontière avec la Serbie.

Après avoir ouvert sa porte aux migrants, Zagreb a assuré vendredi être arrivé à saturation, avec l'arrivée de plus de 17 000 personnes en trois jours. Ses autorités ont reconnu vouloir forcer la main à Budapest en renvoyant les migrants en autocar et en train vers la frontière hongroise.

Le premier ministre croate Zoran Milanovic a prévenu que son pays allait continuer alors que Budapest accusait Zagreb d'encourager les migrants à franchir «illégalement» la frontière.

«La Croatie ne deviendra pas le centre de réfugiés de l'Europe», a-t-il prévenu.

Les migrants, dont de nombreux réfugiés syriens, viennent de Grèce après une périlleuse traversée depuis la Turquie pour la plupart. Leur longue marche les conduit à la Macédoine puis la Serbie, d'où ils tentent de gagner l'Allemagne et d'autres pays d'Europe occidentale.

Du pain et de la soupe

Les migrants ont également afflué vers la Slovénie voisine, qui tentait difficilement samedi de canaliser ces flots arrivant de Croatie.

Des centaines de réfugiés ont passé la nuit à la belle étoile à Bregana, entre les deux pays, tandis que d'autres restaient massés au petit poste-frontière voisin d'Harmica, exigeant que la police slovène les laisse entrer, a constaté l'AFP.

Ghaiath Khaddam, un Syrien 39 ans, ex-employé des douanes, voyage avec sa mère. «Ils ont laissé passer des gens vers midi et toutes les heures, ils nous disent qu'ils ouvriront la frontière», explique-t-il à l'AFP. «Heureusement les Croates nous donnent à manger, de la soupe, du pain des fruits».

La Slovénie est prête à accueillir «jusqu'à 10 000» réfugiés s'ils présentent une demande d'asile, a déclaré son ambassadeur en Allemagne, Marta Kos Marko.

Vendredi soir, la police slovène a dispersé au gaz lacrymogène plusieurs centaines de migrants qui cherchaient à forcer sa frontière avec la Croatie. Selon la police, à vendredi minuit, 1287 migrants étaient déjà entrés dans le pays.

Vendredi, le premier ministre Miro Cerar avait déclaré que, si la pression continuait, son pays pourrait envisager des couloirs de transit vers l'Autriche.

La police hongroise a indiqué qu'à vendredi minuit, depuis le début de la crise, 209 963 réfugiés avaient traversé la frontière hongroise, dont 200 973 à partir de la Serbie et 7993 à partir de la Croatie.

Un milliard pour la Turquie?

L'Autriche attend 10 000 migrants samedi, selon la police, et 6700 migrants sont arrivés de Hongrie dans la nuit avant d'être redirigés vers différents centres d'enregistrement et d'accueil.

L'évolution de la crise migratoire dans cette partie de l'Europe maintient la pression sur l'UE, dont les dirigeants se retrouvent mercredi à Bruxelles pour tenter de surmonter leurs divisions.

Un haut responsable de l'UE a affirmé samedi que l'Europe devrait encourager les personnes fuyant la guerre en Syrie à demeurer dans les pays voisins en aidant les pays d'accueil.

Le commissaire à l'Élargissement de l'UE, Johannes Hahn, a précisé qu'il proposait notamment d'allouer à la Turquie, qui a accueilli plus de deux millions de Syriens, «jusqu'à un milliard d'euros», pour l'aider à «faire face à ce défi».

Pour améliorer la situation dans les camps de réfugiés au Liban ou en Jordanie, l'Autriche et l'Allemagne ont plaidé pour une augmentation de 5 milliards d'euros de l'aide de l'ONU aux réfugiés, lors d'une conférence de presse commune à Vienne.

Les pays d'Europe occidentale accusent le coup : des manifestants opposés à l'afflux croissant de réfugiés en Finlande ont brièvement bloqué un poste-frontière avec la Suède, tandis que plus de 2000 personnes ont crié en revanche leur solidarité avec les migrants à Calais (France).

En Grèce, les garde-côtes ont retrouvé le corps d'une Syrienne de cinq ans, suite au naufrage d'une embarcation venant de Turquie. La veille une petite de quatre ans avait déjà été retrouvée sur le rivage turc, rappelant l'image du petit Aylan devenu un symbole du drame des migrants.

La multiplication des naufrages a poussé quelque 2000 migrants à tenter de gagner la Grèce par la frontière terrestre avec la Turquie. Mais ils étaient toujours bloqués samedi autour d'Edirne (nord-ouest) par la police turque.

En Méditerranée, 2281 migrants partis de Libye ont été secourus samedi au cours de huit opérations, ont annoncé les garde-côtes italiens.