Sous pression de la crise migratoire en Europe déclenchée par le conflit en Syrie, les États-Unis se sont finalement engagés à accueillir davantage que les 1.500 réfugiés syriens vivant actuellement sur leur sol, mais sans fournir de chiffre ni de calendrier.

Le secrétaire d'État John Kerry a fait cette annonce surprise en sortant mercredi d'une réunion d'urgence au Congrès, marquant un changement de pied de son gouvernement qui refusait jusqu'ici le principe d'une plus grande ouverture des portes aux millions de personnes fuyant les guerres et les massacres au Moyen-Orient.

«Nous nous engageons à augmenter le nombre (de réfugiés syriens) que nous allons prendre», a répondu brièvement le chef de la diplomatie américaine à des journalistes, après sa réunion avec des parlementaires au Capitole.

Il a assuré que son gouvernement «regardait très attentivement le nombre (de personnes) que l'on peut gérer du fait de (cette) crise en Syrie et en Europe», mais il n'a donné aucune estimation chiffrée.

D'après les dernières projections du département d'État, il ne devrait y avoir, à la date du 30 septembre prochain, que 1800 Syriens réinstallés aux États-Unis depuis le déclenchement de la guerre civile au printemps 2011. Pour fin septembre 2016, Washington prévoyait déjà que ce nombre oscille entre 5000 et 8000 Syriens accueillis sur le territoire américain.

Face à ces chiffres qui peuvent sembler dérisoires au regard des quatre millions de réfugiés syriens dans le monde et de la tradition historique d'accueil de l'Amérique, des voix s'étaient fait entendre ces derniers jours dans les milieux diplomatiques et humanitaires, notamment en Europe, pour critiquer la passivité de la première puissance mondiale.

Les États-Unis «ont pour responsabilité morale de jouer un rôle dans le traitement de ce dossier», a répliqué Eric Schultz, porte-parole de la Maison-Blanche, qui a aussi «loué l'esprit humanitaire des dirigeants européens» confrontés à la pire crise migratoire sur le Vieux continent depuis la Seconde Guerre mondiale.

Interrogé la semaine dernière après la photo choc d'un garçonnet syrien mort noyé, John Kerry avait reconnu que son pays «pourrait faire beaucoup plus» mais il avait alors exclu l'accueil de davantage de réfugiés «de manière permanente».

Dans le cas de la Syrie, le Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) a recommandé auprès des autorités américaines quelque 17 000 dossiers de Syriens pour qu'ils soient éventuellement réinstallés aux États-Unis.

«Nous pouvons faire plus» 

Pour toutes nationalités confondues dans le monde, les autorités américaines affirment que 70 000 personnes trouvent refuge, légalement, chaque année sur leur sol.

«Nous pouvons faire plus et la situation en Europe nous met bien entendu face à ce défi», a concédé le porte-parole du département d'État John Kirby, soulignant qu'une hausse du nombre de réfugiés aux États-Unis «ne se limiterait pas aux Syriens et aux Irakiens».

Depuis le début de la crise migratoire en Europe, Washington martèle aussi régulièrement que sa «priorité est de protéger la sécurité nationale des États-Unis et leurs ressortissants».

De fait, si les autorités américaines acceptent des Syriens persécutés par le régime de Damas et le groupe État islamique, elles veulent avant tout s'assurer qu'aucun «terroriste» ne passe entre les mailles du filet. Des fonctionnaires du département de la Sécurité intérieure se rendent ainsi régulièrement au Moyen-Orient pour interviewer les candidats à l'exil vers les États-Unis.

«Nous essayons d'écarter les gens qui sont des menteurs, des criminels ou des terroristes potentiels. Cela ralentit le processus» d'admission, a reconnu un haut responsable gouvernemental.

Nombre d'ONG se plaignent en effet des lenteurs des démarches administratives américaines pour qu'un réfugié soit accepté. Cela peut prendre parfois plus de 18 mois.

Les États-Unis se défendent en se targuant également d'être le premier pays donateur en termes d'aide humanitaire pour la Syrie, avec quatre milliards de dollars débloqués depuis 2011.

Au plan diplomatique, John Kerry multiplie aussi depuis des semaines les consultations avec la Russie et l'Arabie saoudite afin de trouver une porte de sortie politique au conflit syrien qui a fait au moins 240 000 morts depuis mars 2011.