Des élus de droite pressent le gouvernement français de serrer la vis aux bénéficiaires de l'aide sociale en les forçant à réaliser cinq heures obligatoires de travail par semaine.

La proposition a été lancée dimanche par le ministre aux Affaires européennes, Laurent Wauquiez, qui a suscité un tollé en décrivant les «dérives de l'assistanat» étatique comme «le cancer de la société française».

Le ministre, ancien secrétaire d'État à l'Emploi, souhaite que les bénéficiaires du Revenu de solidarité active (RSA) prennent conscience, par ces heures de «travail social», du fait qu'ils ont des devoirs «face à leurs droits». Parmi les missions possibles, le politicien évoque la surveillance à la sortie des écoles, les travaux de nettoyage ou encore l'accueil dans les services publics.

Il entend par ailleurs demander dans un projet de loi que les revenus découlant de l'aide sociale ne puissent excéder 75% du salaire minimum de manière à garantir que les bénéficiaires soient poussés à travailler.

Stigmatisation «indécente»

Sa sortie a été rapidement décriée par la gauche française, qui s'insurge contre une stigmatisation «indécente» de cette tranche de population défavorisée.

«Dire que les gens qui vivent du RSA sont des gens qui ont les bras ballants qui attendent et sont très heureux de vivre de l'assistance, c'est vraiment ne rien connaître à la réalité des choses», a déploré la première secrétaire du Parti socialiste, Martine Aubry.

L'ex-secrétaire d'État Yves Jégo, élu de droite qui s'apprête à se rallier à une coalition centriste, est allé plus loin hier en évoquant une «gangrénisation des esprits» au sein du parti de la majorité, l'UMP.

Au sein des syndicats et des associations qui travaillent auprès des bénéficiaires du RSA, la réaction est encore plus vive.

«J'ai été très choqué de cette attaque contre les personnes les plus pauvres, les plus fragiles de la société. C'est vraiment inadmissible», indique en entrevue le président d'ATD Quart Monde, Pierre-Yves Madignier.

«Quand on gagne 1300 euros (environ 1780$) par mois pour quatre personnes, je ne vois pas où est le fait de profiter du système. Ça ne correspond pas à la réalité des gens», relève-t-il.

«Travail de punition»

M. Madignier ne croit pas non plus que l'on fera évoluer positivement la situation en imposant des heures obligatoires de «travail social» aux bénéficiaires du RSA. Une telle mesure reviendrait, selon lui, à «faire du travail une punition» alors que les personnes concernées n'ont «qu'une envie», trouver un emploi en bonne et due forme.

La sortie de Laurent Wauquiez a été bien accueillie par l'UMP, qui parle de propositions de «bon sens». Mais elle a aussi suscité des critiques au sein du gouvernement, venant de plusieurs ministres de haut rang.

Le Monde estime que la sortie du ministre des Affaires européennes et son «recadrage public» constituent potentiellement une stratégie pour courtiser ceux qui approuvent ses idées tout en «ménageant» ceux qui le désavouent. Ou un ballon d'essai.

M. Wauquiez, quoi qu'il en soit, persiste et signe. «J'ai juste dit tout haut ce que beaucoup de Français pensent tout bas», a-t-il déclaré hier.