Le président vénézuélien Hugo Chavez va devoir remanier son gouvernement après la démission de son vice-président, alors que le pays est secoué par des manifestations qui ont déjà fait deux morts après la suspension d'une chaîne de télévision très critique envers le chef de l'État.

Ramon Carrizalez, le vice-président qui occupait également le poste tout aussi clef au Venezuela de ministre de la Défense, a démissionné lundi «pour des raisons strictement personnelles», en même temps que sa femme Yubiri Ortega, ministre de l'Environnement.

Des rumeurs faisaient état de différends entre le président socialiste et M. Carrizalez, un ex-colonel de 59 ans devenu un fidèle collaborateur du chef de l'Etat, occupant divers postes ministériels ces six dernières années.

Mais elles n'ont pas été confirmées et selon la ministre de l'Information Blanca Eckhout, M. Chavez a accepté la démission présentée par son numéro deux «pour des raison strictement personnelles», sans plus de précisions.

Ces démissions suivent le départ mi-janvier du ministre de l'Energie électrique, Angel Rodriguez, prié de quitter le gouvernement à la suite de l'échec d'un programme de rationnement de l'électricité à Caracas pour faire face à une crise énergétique prolongée.

Le ministre des Sciences et de la Technologie, Jesse Chacon, a aussi démissionné récemment en raison d'un scandale bancaire impliquant son frère et qui s'était soldé par la fermeture et la nationalisation de plusieurs petites banques locales.

M. Chavez doit nommer ses nouveaux collaborateurs à un moment délicat, après le retrait du réseau câblé dimanche de la télévision privée RCTV qui a provoqué des manifestations au cours desquelles deux jeunes hommes sont morts.

Jasin Carrillo, 15 ans, du Parti socialiste (PSUV au pouvoir) et Marcos Rosales, 28 ans, étudiant en médecine, ont été tués par balles dans l'Etat de Merida (ouest) au cours d'affrontements parallèles aux manifestations lundi et mardi, selon des sources officielles.

Les manifestations à Merida ont fait 33 blessés, des bâtiments et véhicules ont été incendiés, selon la presse locale.

A Caracas, des centaines d'étudiants ont encore défilé mardi contre la suspension de RCTV, mais les manifestations n'avaient rien à voir avec les rassemblements massifs qui avaient suivi en 2007 le retrait de la licence hertzienne de la chaîne.

RCTV et cinq autres petites stations ont été suspendues par les câblo-opérateurs en vertu d'une nouvelle réglementation qui oblige les télévisions «nationales» --au moins 30% de contenus produits au Venezuela-- à retransmettre les discours fleuve de M. Chavez.

Vendredi et samedi, RCTV n'avait pas diffusé ses deux dernières allocutions. La chaîne veut déposer un recours contre la réglementation et se considère comme une station «internationale», mais pour le gouvernement elle est «nationale».

Depuis 2007, date à laquelle sa licence hertzienne lui avait été retirée, RCTV diffusait sur le câble, de Miami, sous le nom de RCTV International.

Washington et Santiago, qui considère qu'une des petites chaînes suspendues, TV Chile, est chilienne, ont protesté, tandis que Paris a exprimé sa «préoccupation».

Le ministère vénézuélien des Affaires étrangères a demandé mardi au gouvernement français «de rectifier rapidement sa position», faute de quoi il pourrait «réviser ses relations avec la France».

Plusieurs opposants au Venezuela et des organisations internationales, comme Human Rights Watch ou Reporters sans frontières ont dénoncé une «atteinte à la liberté d'expression».