Le président colombien Alvaro Uribe, au centre d'une polémique sur l'organisation d'un référendum lui permettant de briguer un troisième mandat, fait durer le suspense sur sa candidature, au grand dam de ses adversaires à six mois du scrutin présidentiel.

EPrésidentielle en Colombie: Uribe cultive le suspensen vertu de la loi électorale, il aurait dû dévoiler publiquement ses intentions lundi, mais le chef de l'État sortant, en déplacement au Portugal, n'a pas prononcé un mot. Le président «doit faire savoir à l'organisme électoral s'il souhaite participer au scrutin au moins six mois avant la présidentielle, prévue le 30 mai 2010», avait annoncé le responsable du Registre national, l'un des organismes chargés de son organisation.

Les juristes ont compulsé les textes, sans unanimité sur les obligations du président, dont les proches assurent qu'il peut se fonder sur une loi relative à l'organisation des référendums et attendre au moins jusqu'au 30 janvier.

En août 2008, ses partisans avaient obtenu cinq millions de signatures en faveur de l'organisation d'un référendum d'initiative populaire qui permettrait, s'il était approuvé, de modifier la Constitution pour lui permettre d'être candidat à un troisième mandat.

Après des mois de polémiques sur sa légalité, une loi a finalement été adoptée qui permettrait cette consultation.

Cette loi doit cependant être encore validée par la Cour constitutionnelle et le pays ne sait toujours pas si le référendum aura lieu ni si Alvaro Uribe, arrivé au pouvoir en 2002 et jouissant de 64% d'opinions favorables en dépit des critiques sur son bilan en matière de droits de l'homme, sera candidat.

«Cela dépendra de la Cour constitutionnelle, du peuple et de la volonté du Seigneur», a-t-il répondu fin novembre.

«Bien qu'il n'ait pas dit explicitement qu'il veut être candidat, il se comporte comme tel tous les jours: il parcourt le pays en faisant des promesses et réalise toutes sortes de tours pour écarter ses possibles adversaires», assure Milton Rengifo, conseiller en image du candidat Gustavo Petro (Pôle démocratique alternatif, gauche).

Le mutisme du président sur ses intentions gêne les autres candidats, en particulier dans son propre camp conservateur.

«Ils savent que si leur «chef» se présente ils n'ont pas beaucoup d'options (...) c'est un sentiment qui use», déclare Fernando Cano, politologue de l'université de El Rosario, évoquant notamment l'ex-ministre de la Défense Juan-Manuel Santos, qui serait en tête de son camp en l'absence d'Uribe, selon les instituts de sondage.

Quand à ses opposants, ne sachant contre qui lutter, «ils n'ont pas pu mettre en place une stratégie électorale», ajoute-t-il. Les habituels stratèges des campagnes ont même préféré à ce stade se détourner de la présidentielle pour se concentrer sur les législatives et les régionales.

Un «outsider» remarqué, tente toutefois de tirer parti de la situation: le candidat sans étiquette Sergio Fajardo, ex-maire de Medellin, qui pourrait aller jusqu'au deuxième tour selon les instituts de sondages.

Il est en campagne depuis des mois et refuse de se mêler au débat. «Nous allons de l'avant car nous avons une conviction. Nous ne sommes par ici à cause d'Uribe ou de son absence (...) Nous ne sommes pas en attente de ce qu'il annonce ou non», a-t-il déclaré à l'AFP.