Avant d'autoriser la simulation de noyade sur des suspects d'Al-Qaeda, les responsables du gouvernement américain ignoraient que les États-Unis avaient intenté des procès pour crimes de guerre après la Deuxième Guerre mondiale contre ceux qui y avaient recouru. Ils ne savaient pas non plus que cette forme de torture était la favorite de régimes despotiques, de l'Inquisition espagnole à Pol Pot en passant par la Chine communiste des années 1950.

Ni le président des États-Unis, ni les membres de son administration, ni les dirigeants du Congrès des États-Unis n'ont émis des réserves lorsque les responsables de la CIA les ont assurés que les techniques d'interrogatoire «accrues» n'étaient pas de la torture parce qu'elles avaient été utilisées sur des Américains dans le cadre de leur entraînement militaire, il y a plusieurs décennies. Ils ne savaient pas que cet entraînement militaire avait servi, dans les années 1950, à donner aux soldats américains une idée des méthodes de torture utilisées par les communistes pendant la guerre de Corée. Ils ne savaient pas non plus que les anciens interrogateurs de l'armée américaine avaient émis de sérieux doutes sur l'efficacité de ces méthodes, dont le but premier était de soutirer de fausses confessions.

Voilà quelques-unes des révélations que l'on retrouve dans une enquête publiée aujourd'hui à la une du New York Times, dont les journalistes ont mené des interviews auprès de deux douzaines de responsables de l'administration Bush, de la CIA, du ministère de la Justice et du Congrès. Certains d'entre eux sont encore à leur poste.

L'ignorance de ces décideurs tient peut-être à la seule incompétence de la CIA et de son ancien chef, George Tenet, qui les ont mal informés des origines des techniques «accrues» auxquelles ils ont donné le feu vert. Elle vient peut-être aussi d'un désir de protection contre d'éventuelles poursuites.

P.S. : Selon un ancien psychiatre militaire, des techniques d'interrogatoire «accrues» ont été utilisées par les agents de la CIA afin de pouvoir établir un lien entre Al-Qaeda et l'Irak de Saddam Hussein.