«Trois ans après la crise, pas un seul responsable financier n'a été condamné à la prison, et ce n'est pas acceptable», a déclaré Charles Ferguson lors de la cérémonie de remise des Oscars, le 27 février à Los Angeles, après avoir reçu une statuette pour son film Inside Job sur la crise financière de 2008.

Ce n'est pourtant pas les preuves de délinquance financière qui manquaient. Mais, comme l'a démontré le New York Times dans ce long article publié jeudi, le même laxisme qui a mené à la crise a contribué à l'absence de poursuites. Le fait qu'aucun responsable financier n'ait été inculpé est d'autant plus remarquable que pas moins de 800 dirigeants bancaires s'étaient retrouvés derrière les barreaux à la suite du scandale des Savings and Loans qui a éclaté en 1987 aux États-Unis.

Au début de son reportage, le Times évoque une rencontre privée mettant en présence Tim Geithner, qui était alors président de la Réserve fédérale de New York, et Andrew Cuomo, qui était alors ministre de la Justice de New York, en octobre 2008. Selon trois sources, Geithner aurait fait comprendre à Cuomo que des poursuites contre des responsables de Wall Street étaient susceptibles de compromettre la stabilité des marchés financiers à un moment critique. Les deux hommes contestent aujourd'hui cette version.

L'absence de poursuites ne tient évidemment pas à deux seuls hommes, comme le laisse entendre cet extrait du reportage du Times que je cite dans le texte :

Leading up to the financial crisis, many officials said in interviews, regulators failed in their crucial duty to compile the information that traditionally has helped build criminal cases. In effect, the same dynamic that helped enable the crisis - weak regulation - also made it harder to pursue fraud in its aftermath.

A more aggressive mind-set could have spurred far more prosecutions this time, officials involved in the S.&L. cleanup said.

"This is not some evil conspiracy of two guys sitting in a room saying we should let people create crony capitalism and steal with impunity," said William K. Black, a professor of law at University of Missouri, Kansas City, and the federal government's director of litigation during the savings and loan crisis. "But their policies have created an exceptional criminogenic environment. There were no criminal referrals from the regulators. No fraud working groups. No national task force. There has been no effective punishment of the elites here."