Pour la première fois de sa présidence, Barack Obama a invoqué le privilège de l'exécutif pour protéger la confidentialité de documents du ministère de la Justice réclamés par une commission du Congrès américain qui enquête sur l'opération «Fast and Furious».

La décision de la Maison-Blanche survient à quelques heures d'un vote que doit tenir la même commission sur un projet de résolution visant le ministre de la Justice Eric Holder pour «outrage au Congrès». Selon Darrell Issa, président républicain de la commission de la Surveillance du gouvernement, Holder n'a pas coopéré à son enquête sur le scandale de trafic d'armes à la frontière mexicaine.

«Fast and Furious» est le nom d'une opération lancée en 2009 par l'Agence fédérale sur l'alcool, le tabac et les armes (AFT), qui visait à faire passer des armes en contrebande au Mexique avec l'objectif de les suivre à la trace afin de piéger des membres de cartels mexicains. Or l'ATF a perdu la trace de quelque 2 000 de ces armes, dont l'une a servi à tuer un garde-frontière américain. Le scandale a éclaté en février 2011.

Le privilège de l'exécutif a souvent été invoqué par des présidents qui voulaient dissimuler au public des informations gênantes ou même des agissements criminels. Richard Nixon l'a fait dans l'affaire Watergate, Bill Clinton l'a fait dans l'affaire Lewinsky et George W. Bush l'a fait dans au moins quatre dossiers, dont celui des procureurs fédéraux congédiés pour des motifs politiques.

Les présidents peuvent également avoir des motifs légitimes pour invoquer ce privilège. Dans le cas de l'opération «Fast and Furious», le ministère de la Justice a fait valoir que la livraison «sous la contrainte» au Congrès des documents réclamés par la commission de Darrell Issa «détériorerait de manière significative la capacité de la branche exécutive à répondre indépendamment et efficacement au travail de contrôle du Congrès».

Ce type de délivrance serait de plus «en contradiction avec la séparation des pouvoirs établie par la Constitution».

De deux choses l'une : ou bien l'administration Obama a quelque chose à cacher ou bien les républicains du Congrès tentent un autre coup d'éclat dans une enquête qui vire à l'obsession.