Il aura fallu une crise financière mondiale pour arracher la campagne électorale américaine à ses coups bas personnels, et obliger les deux candidats à la Maison-Blanche à s'atteler en ce début de semaine à la préoccupation numéro un de leurs concitoyens: l'économie.

Le républicain John McCain et le démocrate Barack Obama se querellent depuis des mois pour savoir qui sera le meilleur «commandant en chef», autrement dit qui sera le plus apte à gérer immédiatement une crise mondiale majeure depuis le Bureau ovale.

L'onde de choc internationale du dépôt de bilan de la banque d'affaires américaine Lehman Brothers lundi leur a fourni l'occasion de se mesurer à une vraie crise.

De nombreux sondages témoignent que l'économie représente le premier sujet de préoccupation des Américains, moins de 50 jours avant l'élection présidentielle du 4 novembre, mais révèlent aussi que ni M. Obama, ni M. McCain ne les ont encore vraiment convaincus de leur capacité à redresser la situation économique.

Sur le front de l'économie, «aucun des deux n'a encore réussi à livrer un message capable de convaincre les Américains», souligne Andrew Dowdle, professeur de science politique à l'Université de l'Arkansas.

C'est ce que les deux candidats ont tenté de faire lundi auprès d'électeurs aux abois, qui voient fondre leurs retraites et leurs économies.

Et ce retour à un sujet primordial tranche avec les bassesses de la semaine dernière quand le camp McCain accusait par exemple Barack Obama d'insulter la colistière républicaine Sarah Palin en utilisant l'expression populaire, courante aux États-Unis, «mettre du rouge à lèvres à un cochon».

Lundi, le candidat démocrate s'est empressé d'imputer la crise financière aux huit années de gouvernement Bush et a prédit que les Américains en connaîtraient quatre équivalentes avec M. McCain.

Son rival républicain a promis une réforme de Wall Street, et assuré que Barack Obama allait augmenter les impôts et miner la croissance économique.

Le sénateur de l'Arizona, qui mène désormais d'une courte tête dans les sondages, a aussi lancé lors d'un meeting en Floride (sud-est) que les éléments fondamentaux de l'économie étaient «solides», s'attirant aussitôt les railleries de son adversaire.

«Sénateur McCain, de quelle économie parlons-nous?», a rétorqué M. Obama dans le Colorado (ouest).

M. McCain, interrogé sur le sujet mardi matin sur la chaîne de télévision ABC, a expliqué que, pour lui, les éléments fondamentaux de l'économie étaient «les travailleurs américains».

«Je sais que les travailleurs américains sont les plus solides, les meilleurs, les plus productifs et les plus innovants», a-t-il déclaré. Les travailleurs «ont été trahis par la corruption et la détresse qui met en danger leur avenir», a poursuivi le candidat républicain, promettant qu'il saurait «régler cela».

Il y a plusieurs mois, le sénateur de l'Illinois avait tenté de capitaliser sur une phrase imprudente de M. McCain, avouant qu'il n'entendait «pas grand chose» à l'économie.

Selon un sondage ABC News/Washington Post, 47% des électeurs font confiance à M. Obama en matière d'économie contre 42% à M. McCain.

Le «manque de foi (de Barack Obama) dans les travailleurs américains peut expliquer pourquoi il veut augmenter les impôts en ces temps difficiles pour l'économie, mais ce n'est pas une façon de diriger notre pays», a asséné John McCain.

Après cette partie de ping-pong, on peut s'attendre à ce que l'économie se retrouve au coeur des trois débats qui opposeront les candidats à partir du 26 septembre, chacun voulant démontrer ses capacités en ce domaine. Jusqu'à la prochaine attaque personnelle dans une publicité négative...