Pour les actionnaires de SNC-Lavalin, évidemment, il s'agit d'une autre grosse taloche sur la valeur à court terme de leur placement.

Mais pour les investisseurs opportunistes, c'est peut-être une occasion de racheter au rabais des actions d'un géant de l'ingénierie avec une bonne valeur d'actifs.

Ainsi se résument les commentaires d'analystes boursiers émis hier après l'annonce des accusations de fraude et de corruption déposées par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) à l'encontre de SNC-Lavalin, relativement à des contrats litigieux en Libye.

«Ces accusations n'ont pas d'impact matériel immédiat, d'autant que le règlement de ces litiges viendra plus tard. Entre-temps, SNC-Lavalin demeure en situation financière solide, sans dette et avec 1,1 milliard en comptant», a signalé Benoit Poirier, analyste chez Valeurs mobilières Desjardins.

«De plus, SNC-Lavalin est en processus de revente de sa part de l'autoroute 407 [péage à Toronto], qui pourrait lui rapporter l'équivalent de 14$ par action [2,1 milliards].»

Quant à l'impact des accusations sur le carnet de commandes de SNC-Lavalin, Benoit Poirier l'anticipe minimal parce qu'elles «n'affectent pas sa capacité à soumissionner sur des projets publics ou privés».

Cette interprétation a aussi été corroborée hier par l'Autorité des marchés financiers (AMF), de qui relèvent depuis deux ans la vérification judiciaire et l'autorisation des firmes qui veulent soumissionner sur des projets gouvernementaux d'envergure.

«Les événements à l'origine des accusations [contre SNC-Lavalin] étaient connus de l'Autorité au moment où la décision [autorisation] a été rendue, et le tout a donc été considéré dans le cadre de notre décision, a-t-on indiqué hier à la direction de l'AMF.

«L'Autorité ne compte donc pas révoquer l'autorisation accordée à SNC. Évidemment, nous continuons de suivre de près la suite des choses et nous interviendrons au besoin.»

Selon l'analyste Bert Powell, de BMO Marchés des capitaux, les accusations déposées par la GRC contre SNC-Lavalin, quoique gênantes, pourraient en fait «marquer le début de la fin des questions de corruption» qui hantent l'entreprise depuis trois ans.

«Le plus important, c'est que ces accusations n'affectent pas la viabilité d'affaires des principales entités d'exploitation de SNC-Lavalin. Quant au montant d'éventuelles amendes, ça m'apparaît d'importance secondaire à ce moment-ci.»

De nombreuses années

De l'avis de Maxim Sytchev, directeur de la recherche chez Valeurs mobilières Dundee, «tout montant d'amendes et des sanctions totalisant moins de 300 millions serait vu de façon positive» par les investisseurs boursiers qui lorgnent des actions de SNC-Lavalin à inclure ou rajouter dans leur portefeuille.

Mais avant de parvenir à de tels règlements, tout indique que les divers processus judiciaires contre SNC-Lavalin en Suisse et, désormais, au Canada pourraient «s'allonger sur de nombreuses années».

Et d'ici là, selon M. Sytchev, les actionnaires de SNC-Lavalin devraient bénéficier bientôt des efforts de recentrage et de redressement mis en place par la nouvelle haute direction de l'entreprise, complètement changée depuis deux ans.

L'action a perdu plus de 7% de sa valeur, hier, pour finir la journée à 40,63$.

SNC-Lavalin en Bourse

> Capitalisation: 6,19 milliards (Toronto)

> Plus récente cote: 40,63$ (- 7%)

> Haut/bas 52 semaines: 59,63$/38,67$

> Multiple cours/bénéfice récent: 18 fois

> Rendement en dividende: 2,3%

> Perte de valeur des actions depuis un an: 12%

> Gain de l'indice industriel à la Bourse de Toronto depuis un an: 24%

> Recommandations d'analystes: acheter: 9, conserver: 5, vendre: 1

> Prochains résultats (le 5 mars, pour la fin d'exercice 2014)

> Prévision des analystes: Revenus: 7,94 milliards (+ 0,4% en un an) Bénéfice d'exploitation: 713 millions (+ 211%) Bénéfice net: 302 millions (+ 745%) Bénéfice net par action: 1,29$ (+ 437%)

Source: Bloomberg