Avec des manifestations violentes qui se multiplient dans le pays, la Chine a décidé d'avoir recours aux sondages pour apaiser les tensions.

Ainsi, pour la première fois de son histoire, Pékin aura recours à des consultations avant de nommer ou promouvoir un dirigeant. Selon ce que rapporte ce matin le China Daily, quelque 80 000 personnes seront ainsi consultées, qu'ils soient fonctionnaires, employés de sociétés d'État ou «simples citoyens».

C'est le Bureau national de la statistique qui mènera les enquêtes sur la popularité des gens à nommer.

La manoeuvre a clairement pour objectif de réduire la tension entre gouvernants et gouvernés. Ces derniers mois, la Chine a connu son lot de manifestations. Outre celle du Tibet en mars, la manifestation la plus importante est probablement celle de Wenghan, dans le Guizhou, où un poste et des voitures de police ont été incendiés. Les quelque 30 000 protestataires reprochaient aux policiers d'avoir camouflé les causes de la mort d'une adolescente pour protéger un proche d'un haut dirigeant, accusé par les manifestants d'avoir tué la jeune femme avant de la jeter dans la rivière.

«Si un tel mécanisme avait été en place plus tôt, les résidants de Wenghan auraient pu faire valoir leur point de vue par les canaux appropriés et les manifestations auraient été évitées», souligne Wang Yukai, expert à l'École national d'administration, cité par le quotidien pékinois.

Le cas de Guizhou à la fin juin n'est pas le seul, mais il semble être celui qui a décidé les autorités à bouger. «Ça peut prendre des années pour un gouvernement à se bâtir une crédibilité auprès du public, écrit le China Daily en éditorial, mais il est facile de la perdre en raison de responsables gouvernementaux malhonnêtes et corrompus.»

La corruption... Contrairement à ce qu'on peut croire en Occident, la question occupe une place importante dans les médias locaux. Les sceptiques diront que seulement une infime partie des corrompus sont attrapés, mais il est clair que le pouvoir veut donner des exemples avec les pommes pourries qu'il réussit à envoyer en prison.

Cette mesure s'inscrit aussi dans un contexte de relations pas toujours harmonieuses entre Pékin et ses provinces : la capitale a beau prôner ses vertus anticorruption, bien des décisions sont prises localement, hors de son pouvoir, là où les barons locaux font à leur tête.

La note qui annonce la tenue de ses sondages précise d'ailleurs qu'une telle consultation doit être libre de toute intervention des gouvernements locaux. «Les dirigeants ont l'habitude de se soucier seulement de leurs supérieurs. Maintenant, les sondages vont les obliger à porter plus attention au public», souligne encore M. Wang.

Encore la fin de semaine dernière, des ouvriers migrants ont provoqué des émeutes et manifesté dans la province côtière du Zhejiang, au sud de Shanghai. «Il s'agit d'un crime grave, consistant à empêcher des organes de la sûreté publique d'accomplir leur devoir et à rassembler des foules pour s'en prendre à des bâtiments administratifs», a déclaré un responsable de la police, selon ce qui a été rapporté sur l'internet.