(Paris) Le ministre français de l’Intérieur Gérald Darmanin est attendu lundi soir à Rome, où il prévoit de délivrer un message de « fermeté » face aux traversées clandestines de la Méditerranée, après l’afflux de migrants sur l’île italienne de Lampedusa.

M. Darmanin doit rencontrer vers 19 h 30 son homologue italien Matteo Piantedosi, selon son entourage.

« À la demande du président [Emmanuel Macron] je vais à Rome » afin de proposer de l’aide à l’Italie pour « tenir sa frontière extérieure », première porte d’entrée vers l’Europe en provenance d’Afrique du Nord, a-t-il déclaré lundi sur les médias Europe1/Cnews.

Entre lundi et mercredi dernier, environ 8500 personnes, soit plus que l’ensemble de la population de Lampedusa, sont arrivées à bord de 199 bateaux, selon l’agence des Nations unies pour les migrations.  

Cette situation a mis les capacités d’accueil de l’île sous forte tension, généré une onde de choc politique en Italie et relancé l’épineuse question de la solidarité européenne en matière d’accueil et de répartition des demandeurs d’asile, pour soutenir les pays en première ligne de ces arrivées.

« Il ne peut pas y avoir comme message donné aux personnes qui viennent sur notre sol [européen] qu’ils seront accueillis quoi qu’il arrive », a toutefois souligné Gérald Darmanin, qui veut faire preuve de « fermeté ».

« Nous devons appliquer les règles européennes », a-t-il ajouté : la France pourra « accueillir » les personnes persécutées « pour des raisons politiques ». Mais dans « 60 % » des cas, ils « viennent de pays comme la Côte d’Ivoire, la Guinée, la Gambie », où « il n’y a pas de question humanitaire ».

Nouvelles mesures en Italie

« Nous devons protéger les frontières extérieures de l’Union européenne et surtout tout de suite regarder les demandes d’asile et, quand elles ne sont pas éligibles, les renvoyer dans leur pays », a-t-il dit.

Un message en direction du gouvernement italien de droite et d’extrême droite, dont la cheffe Giorgia Meloni a reproché dimanche à ses partenaires européens de manquer de solidarité envers l’Italie qui a accueilli sur son territoire près de 130 000 personnes depuis le début de l’année, près du double comparé à 2022 sur la même période.

Sans attendre de réponse européenne, le gouvernement italien a d’ailleurs approuvé lundi de nouvelles mesures destinées à endiguer les arrivées, notamment en créant davantage de centres de rétention pour les migrants déboutés de leur demande d’asile et en augmentant la durée maximale de cet enfermement, passant de quatre à 18 mois.

Gérald Darmanin, lui, se rend à Rome, mais pas à Lampedusa, comme l’avait fait la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen qui y a présenté un plan d’urgence dimanche.  

Ce plan d’aide en dix points, destiné à gérer l’urgence des flux migratoires vers l’Italie, prévoit de mieux répartir les demandeurs d’asile entre les pays européens ou encore de faciliter les retours.

Il est censé conjuguer fermeté à l’encontre des passeurs et facilitation des voies légales d’entrée dans l’espace européen pour les candidats à l’exil éligibles à l’asile.

« Vieilles recettes »

Les partenaires européens de l’Italie, premier pays d’entrée dans l’UE sur cette route migratoire, doivent prendre leur part, a estimé dimanche la présidente de la Commission européenne.

« La réponse doit être trouvée dans la coopération entre Européens » et « entre les Européens avec la Tunisie », a abondé lundi aux Nations unies la cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna.

« De vieilles recettes que l’Union européenne ressert depuis des décennies et qui ont toutes échoué », ont déploré lundi dans un communiqué commun plus de 80 associations, dont des ONG de secours en mer comme SeaWatch et Mediterranea Saving Humans.

Ces organisations s’inquiètent notamment de la « réponse sécuritaire » apportée par les Européens.

Côté français, les autorités anticipent un afflux massif de migrants à la frontière italienne, après les arrivées récentes et cherchent à se doter d’un « espace » de cent places d’enfermement supplémentaires aux locaux de la police aux frontières, à Menton.  

La Méditerranée centrale est la route migratoire maritime la plus dangereuse au monde : plus de 2000 migrants y ont trouvé la mort depuis le début de l’année, selon l’organisation internationale pour les migrations.