(Londres) Les électeurs votent jeudi en Angleterre dans un scrutin local test pour le premier ministre Rishi Sunak et les conservateurs au pouvoir, en difficulté avant des législatives prévues pour l’année prochaine.

Plus de 8000 sièges sont en jeu dans 230 collectivités locales à travers l’Angleterre. Les bureaux de vote ont ouvert à 7 h (2 h, heure de l’Est) et fermeront à 22 h (17 h, heure de l’Est) avec une exigence inédite, celle de présenter une pièce d’identité pour pouvoir voter.  

Ce changement crée des remous et a été qualifié par ses détracteurs de menace sur la démocratie en raison du nombre des électeurs qui risquent d’être exclus. Dans les rangs des travaillistes, certains députés dénoncent une décision destinée à contrer l’avance qui est la leur, d’après les sondages.

L’association Electoral Reform Society, opposée à cette nouvelle obligation, a affirmé avoir constaté « des exemples innombrables » d’électeurs empêchés de voter.

Mais l’Association of Electoral Administrators, qui rassemble les administrateurs locaux des scrutins, a assuré en début d’après-midi que le vote se déroulait « aussi bien que d’habitude ».

Ces élections, pour lesquelles le taux de participation est traditionnellement bas, sont les premières depuis que Rishi Sunak est arrivé au pouvoir fin octobre après la succession de scandales de l’ère Boris Johnson et les 49 jours chaotiques de Liz Truss à Downing Street.

Le premier ministre n’attend pas un miracle. « Nous avons toujours dit que ce serait des élections difficiles pour nous », a-t-il déclaré mercredi, citant parmi ses promesses celle de combler davantage de nids-de-poule, un fléau sur les routes britanniques.

Selon le spécialiste des sondages John Curtice, politologue à l’université écossaise de Strathclyde, une avance de plus de 10 points des travaillistes sur les conservateurs laisse augurer une victoire de l’opposition aux législatives qui doivent avoir lieu d’ici à la fin de l’année prochaine. Leur date n’est pas encore fixée.

Avant d’arriver au pouvoir respectivement en 1997 et en 2010, le travailliste Tony Blair et le conservateur David Cameron avaient tous deux remporté des succès avec une avance à deux chiffres aux élections locales ayant précédé les législatives, a souligné M. Curtice sur la BBC.

« Insatisfaits »

Au cours de leur dernier face-à-face au Parlement mercredi avant le scrutin, le chef de l’opposition, Keir Starmer, s’en est pris aux conservateurs, au pouvoir depuis 13 ans. Il a évoqué les près de deux millions de Britanniques qui vont devoir payer davantage pour leur emprunt parce que le parti de Rishi Sunak « a utilisé leur argent comme un casino », une allusion aux conséquences des décisions financières hasardeuses de Liz Truss qui ont fait bondir les taux d’intérêt.

En réponse, Rishi Sunak lui a opposé les « impôts locaux plus élevés » et les « promesses brisées » des travaillistes.

Les enquêtes d’opinion montrent que les électeurs sont principalement préoccupés par la hausse des prix, qui dépasse les 10 % depuis des mois, et la crise du système public de santé, frappé par des grèves à répétition et notamment un mouvement sans précédent des infirmières.

Les sondages les plus défavorables prédisent une perte de 1000 sièges aux conservateurs.

Ces derniers estiment d’ores et déjà qu’un recul en deçà du millier de sièges équivaudrait à une victoire.

Les résultats sont attendus très progressivement au fil de la journée vendredi, à la veille du couronnement du roi Charles III à l’abbaye de Westminster.

Un « focus group », un groupe de discussion d’électeurs destiné à sonder l’humeur de l’opinion publique, a livré un verdict cinglant sur les conservateurs, bien que Rishi Sunak s’en sorte un peu mieux personnellement. Invités par le cercle de réflexion « More in Common » (Plus en commun) à décrire l’état du Royaume-Uni en un mot, les participants ont cité « cassé », « pagaille », « bazar », « difficultés » et « crise ».

Et même parmi les élus locaux Tories, souvent considérés comme des soutiens de Boris Johnson, certains semblent peu convaincus par l’actuel premier ministre.

Selon un sondage du cabinet Savanta publié jeudi, un quart d’entre eux se disent « insatisfaits » de la direction du parti, et un tiers « insatisfaits » de la direction du pays.