(Pékin) Le président chinois Xi Jinping a assuré mercredi à son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky que la Chine avait « toujours été du côté de la paix » et appelé à « la négociation », lors de leur premier entretien téléphonique depuis le début de l’offensive russe en Ukraine en février 2022.

« Sur le sujet de la crise ukrainienne, la Chine a toujours été du côté de la paix et sa position fondamentale est de promouvoir un dialogue de paix », a déclaré M. Xi, selon la chaîne de télévision d’État CCTV.

« Le dialogue et la négociation » sont la « seule issue » au conflit en cours avec la Russie, a encore dit le chef de l’État chinois, promettant que son pays ne chercherait pas à « tirer profit » de cette « crise ».

M. Zelensky a quant à lui sobrement indiqué dans un tweet avoir eu un échange « long et significatif » avec M. Xi.

Washington a, comme Paris, salué cette conversation, la qualifiant de « bonne chose », tout en disant « ignorer pour l’instant » si cela « peut déboucher sur une initiative, une proposition ou un plan de paix sérieux ».

Pour sa part, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell s’est félicité d’une « première étape importante ».

« Il est très important que la Chine parle à l’Ukraine. Je veux rappeler que nous voulons tous la paix […] Mais tout le monde doit bien comprendre qu’il ne doit pas s’agir de n’importe quelle » paix, a-t-il ajouté. « Ce n’est pas la paix de celui qui est contraint de se rendre face à une invasion brutale, ce doit être une paix juste, qui reconnaisse les droits du peuple ukrainien ».

La Russie a de son côté « pris acte » de la volonté de Pékin de « s’efforcer de mettre en place un processus de négociation » entre Moscou et Kyiv, mais a vertement accusé l’Ukraine de « saper les initiatives de paix » de par son refus de dialoguer avec elle et lui a reproché de « rejeter toute initiative sensée visant à un règlement politique et diplomatique de la crise ».

« Presque une heure »

Volodymyr Zelensky a par ailleurs dit espérer « une impulsion puissante au développement des relations bilatérales » entre son pays et Pékin, annonçant dans la foulée la nomination de Pavlo Riabikine, un ex-ministre des Industries stratégiques âgé de 57 ans, aux fonctions d’ambassadeur en Chine, un poste vacant depuis février 2021.

L’entretien des deux chefs d’État a duré « presque une heure », a précisé le porte-parole de M. Zelensky, Serguiï Nykyforov. Il a eu lieu « à l’initiative de la partie ukrainienne », a assuré la diplomatie chinoise.

Il s’est agi du premier échange connu entre les deux hommes depuis le début de la guerre en Ukraine, le 24 février 2022. Leur précédente conversation téléphonique remontait à juillet 2021.

Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a salué ce premier appel entre les présidents chinois Xi Jinping et ukrainien Volodymyr Zelensky depuis le début de l’invasion russe, se félicitant d’une « première étape importante ».

« Il est très important que la Chine parle à l’Ukraine. Je veux rappeler que nous voulons tous la paix […] Mais tout le monde doit bien comprendre qu’il ne doit pas s’agir de n’importe quelle » paix, a déclaré le responsable espagnol, en déplacement à Bogota.

« Ce n’est pas la paix de celui qui est contraint de se rendre face à une invasion brutale, ce doit être une paix juste, qui reconnaisse les droits du peuple ukrainien », la « souveraineté » et « l’intégrité des frontières » de l’Ukraine, a souligné l’Espagnol.

Selon le compte-rendu de CCTV, M. Xi a également rappelé son opposition au recours à l’arme nucléaire : « Lorsqu’elles traitent de la question nucléaire, toutes les parties concernées doivent rester calmes et modérées, se concentrer véritablement sur leur avenir et leur destin ainsi que sur celui de l’humanité tout entière et gérer et contrôler ensemble la crise ».

La Chine a en outre fait savoir mercredi qu’elle dépêcherait une délégation en Ukraine afin de rechercher un « règlement politique » au conflit.

« La partie chinoise enverra un représentant spécial du gouvernement chinois, chargé de l’Eurasie, en Ukraine et dans d’autres pays pour des échanges en profondeur avec toutes les parties vers un règlement politique de la crise ukrainienne », a expliqué le ministère des Affaires étrangères.

Volodymyr Zelensky souhaitait depuis des mois s’entretenir avec son homologue chinois dans l’espoir de rendre plus favorable à son pays la position de la Chine au regard de l’invasion russe, mais, selon des experts, celle-ci ne répondait pas aux propositions ukrainiennes.

Pékin avait diffusé en février un document en 12 points présentant sa position sur le conflit en Ukraine et parfois perçu comme un plan de paix.  

Moscou et Kyiv y étaient exhortés à engager des pourparlers tandis qu’y figuraient aussi une mise en garde face à tout recours à l’arme nucléaire et un appel à respecter l’intégrité territoriale de tous les pays – sous-entendu également celle de l’Ukraine dont une partie du territoire est sous contrôle russe.

La Chine, qui n’a pas condamné publiquement la guerre en Ukraine et n’a pas reconnu en septembre l’intégration de quatre régions ukrainiennes à la Fédération de Russie – elle ne l’avait pas fait non plus en 2014 au moment de l’annexion de la Crimée –, a fortement accru ces derniers mois sa coopération politique et économique avec son voisin russe.

Moscou ne voit « aucun progrès » pour prolonger l’accord sur les céréales ukrainiennes

La Russie ne voit « aucun progrès » dans la levée des obstacles à ses exportations d’engrais, une condition pour que Moscou prolonge l’accord sur les exportations de céréales ukrainiennes, qui arrive à échéance mi-mai.

« Jusqu’à présent, nous ne voyons aucun progrès », a déclaré mercredi l’ambassadeur russe auprès des Nations unies à Genève Guennadi Gatilov, ancien vice-ministre des Affaires étrangères, lors d’une conférence de presse.

Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a fait une proposition au président russe Vladimir Poutine – dont on ignore les détails – pour permettre la prolongation de l’accord sur les exportations de céréales ukrainiennes, qui a permis d’atténuer la grave crise alimentaire mondiale qui frappe des centaines de millions de personnes dans le monde.

Cet accord arrive à échéance le 18 mai.

Selon l’ONU, M. Guterres trace dans sa lettre au président russe « les contours d’une voie à suivre proposée pour améliorer, prolonger et étendre » l’accord qui permet depuis juillet l’exportation de céréales ukrainiennes via la mer Noire malgré la guerre.

L’accord a été prolongé le 19 mars. Mais Moscou a proposé soixante jours plutôt que la reconduction tacite initialement convenue de 120 jours, en insistant sur le respect de l’autre volet de l’accord – passé entre la Russie et l’ONU – qui concerne essentiellement ses exportations d’engrais.

« Nous apprécions les efforts de l’ONU, l’ONU essaie de faire de son mieux », a souligné l’ambassadeur, « mais nous n’avons vu pour l’instant que des promesses ».

Moscou a de nouveau menacé mi-avril de suspendre l’initiative sur les céréales si ses cinq exigences n’étaient pas remplies, dont la reconnexion au système bancaire international Swift de la banque russe spécialisée dans l’agriculture Rosselkhozbank.

L’AFP a toutefois pu confirmer mercredi auprès d’une source proche du dossier que les autorités américaines avaient donné à la banque JPMorgan la permission d’effectuer des paiements vers Rosselkhozbank pour permettre des exportations de céréales et d’aliments russes.