(Ramstein) Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, s’est dit « en confiance » vendredi lors d’une réunion en Allemagne dans le fait que l’Ukraine puisse reprendre du terrain aux Russes dans une contre-offensive pour laquelle Kyiv réclame plus d’armes et de munitions.

Réunis sur la base américaine de Ramstein, les alliés de Kyiv ont passé « en revue les différentes capacités, systèmes et fournitures dont les Ukrainiens ont besoin pour reprendre davantage de terrain », a expliqué M. Stoltenberg.

« J’ai confiance dans le fait qu’ils [les Ukrainiens] seront désormais en mesure de libérer encore plus de terrain », a-t-il assuré.

Un an après sa mise en place, le groupe d’une cinquantaine de pays soutenant militairement l’Ukraine « est devenu une extraordinaire communauté d’action » qui a permis des « progrès impressionnants » sur le terrain, a abondé le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin.

En visite à Kyiv jeudi, le chef de l’OTAN s’y était entretenu avec le président Volodymyr Zelensky, qui n’a de cesse d’appeler les Occidentaux à livrer plus de blindés, d’artillerie, de munitions mais aussi des avions de combat et des systèmes de tirs de longue portée pour frapper la logistique russe loin derrière la ligne de front.

PHOTO FOURNIE PAR LA PRÉSIDENCE UKRAINIENNE VIA AGENCE FRANCE-PRESSE

Le patron de l’OTAN Jens Stoltenberg en compagnie du président ukrainien Volodymyr Zelensky lors de sa visite à Kyiv, jeudi.

« Tous ensemble, on va s’assurer que l’Ukraine dispose de tout ce dont elle a besoin », a déclaré le secrétaire américain à la Défense à Ramstein.

M. Austin a notamment annoncé la livraison dans les toutes prochaines semaines de chars lourds américains Abrams en Allemagne, dans un premier temps pour y assurer la formation des soldats ukrainiens, avant leur déploiement sur le champ de bataille.

« Centre de réparation »

Entre stocks insuffisants, crainte d’escalade et problèmes logistiques, Européens et Américains se sont cependant montrés plus prudents que Kyiv ne l’aurait voulu.

La livraison d’avions de combat à l’Ukraine divise en particulier les soutiens de Kyiv, l’Allemagne paraissant particulièrement réticente.

Mais l’envoi d’avions modernes de conception occidentale doit encore faire l’objet de discussions. Plusieurs pays ont affiché des ouvertures et une décision serait possible « avant l’été », a récemment affirmé le ministre danois de la Défense.

La Slovaquie et la Pologne ont commencé à fournir à l’Ukraine des chasseurs MiG-29 de conception soviétique. Mais l’envoi d’avions modernes de fabrication occidentale doit encore faire l’objet de discussions.  

« Nous sommes tous convaincus que ce dont l’Ukraine a besoin de toute urgence est une capacité de défense aérienne au sol », a tempéré M. Austin.

« Les Russes disposent d’une puissance aérienne importante et pour faire passer l’armée de l’air ukrainienne de son niveau actuel à celui de l’armée de l’air russe, il faudrait déployer des efforts considérables », a fait valoir le chef d’état-major américain, le général Mark Milley.

« Nous avons réitéré nos demandes d’avions de combat », a de son côté déclaré le ministre ukrainien de la Défense Oleksiï Reznikov.

PHOTO ANDRE PAIN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg

L’Alliance est focalisée sur les fournitures de munitions et de pièces détachées, afin que les systèmes déjà déployés « produisent l’effet escompté », a souligné M. Stoltenberg.

Il s’agit désormais d’une bataille d’usure et une bataille d’usure devient une guerre de logistique.

Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN

L’Union européenne, qui a promis en mars une dotation d’un milliard d’euros pour des munitions prélevées sur les stocks existants, et un second milliard pour des contrats d’achats communs à des entreprises européennes, a dû rassurer l’Ukraine vendredi, son chef de la diplomatie Josep Borrell affirmant à Bruxelles que l’UE « respecte ses engagements ».

Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba avait écrit dans un tweet que « l’incapacité de l’UE à mettre en œuvre sa propre décision » se mesurait sur le front « en vies humaines ».

« Bloc agressif »

Les représentants ukrainien, polonais et allemand sont par ailleurs tombés d’accord à Ramstein pour mettre place un « centre de réparation commun en Pologne » pour les chars Leopard 2, a annoncé le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius.

Les Occidentaux ont fourni pour plus de 150 milliards de dollars d’aide à l’Ukraine depuis le début de l’invasion russe, en février 2022, dont 65 milliards dans le domaine militaire, selon lui.

Après avoir résisté tout l’hiver aux assauts russes sur le front oriental, les forces ukrainiennes disent préparer leur propre offensive pour le printemps ou l’été.

Après les chars lourds, l’Ukraine a annoncé cette semaine avoir reçu les premiers systèmes américains de défense antiaérienne Patriot, une opération coordonnée par les États-Unis, l’Allemagne et les Pays-Bas.

A Kyiv, M. Stoltenberg avait déclaré que « l’avenir » de Kyiv était dans la « famille euro-atlantique », sans rien dire du calendrier d’une éventuelle adhésion à l’OTAN.

La perspective ulcère le Kremlin, qui a fustigé vendredi, par la voix de son porte-parole Dmitri Peskov, la « nature agressive » de l’Alliance atlantique.  

Le Kremlin dément une nouvelle vague de mobilisation

Le Kremlin a une nouvelle fois démenti vendredi toute intention de lancer une deuxième campagne de mobilisation pour envoyer des hommes en Ukraine, en réaction à des articles sur des étudiants convoqués par l’armée.

« Il n’y a pas de discussions au Kremlin au sujet d’une quelconque vague de mobilisation », a affirmé à la presse le porte-parole de la présidence, Dmitri Peskov.

Il répondait à une question au sujet d’articles parus dans des médias russes sur des étudiants d’université ayant reçu des convocations militaires à Moscou et dans d’autres villes de Russie.

« Honnêtement, c’est la première fois que j’entends parler de cela », a dit M. Peskov. « Quelles convocations ? Je ne sais même pas » de quoi il s’agit, a-t-il insisté.

En septembre 2022, le Kremlin avait annoncé la mobilisation de plusieurs centaines de milliers d’hommes en âge de combattre pour donner un nouvel élan à son offensive en Ukraine à la peine.

Depuis, des rumeurs sur une nouvelle vague de convocations vont bon train, surtout depuis que Vladimir Poutine a signé la semaine dernière une loi votée à la hâte par le Parlement facilitant la mobilisation.

Selon cette nouvelle loi, un réserviste peut désormais être mobilisé par voie électronique, via un portail des services publics russes, ou encore si l’ordre est remis à un tiers.

Avant, la convocation devait être remise en main propre au mobilisé, ce qui a permis à de nombreux hommes d’échapper à la première vague en septembre, notamment en fuyant à l’étranger ou en se cachant chez des proches.

Désormais, le refus de se présenter au bureau d’enrôlement privera les intéressés de la possibilité de travailler en tant qu’entrepreneur ou indépendant, de recevoir des prêts ou de disposer de leur logement et de leur voiture.

Les autorités, qui démentaient déjà toute velléité de mobilisation avant l’annonce soudaine de la première vague l’an dernier, ont voté cette nouvelle loi au moment où les forces de Kyiv disent préparer une contre-offensive d’ampleur en Ukraine.