(Paris) Maître-mot : « accélération ». L’exécutif a affiché mardi sa volonté d’engager sans attendre des réformes tous azimuts, une tâche qui s’annonce très compliquée au lendemain d’une allocution d’Emmanuel Macron qui est loin d’avoir convaincu les opposants à la réforme des retraites.

Le chef de l’État s’est donné lundi « 100 jours » pour agir « au service de la France ». Décidé à renouer avec les Français malgré une impopularité record, il se rendra mercredi dans le Bas-Rhin et jeudi dans l’Hérault.

Au pas de charge, il a donné aux partenaires sociaux leur feuille de route : une négociation du « pacte de la vie au travail », aux contours encore flous, d’ici « la fin de cette année » et une autre sur les lycées professionnels « d’ici à l’été ».  

Les syndicats avaient décliné l’invitation à venir à l’Élysée mardi et même le patronat avait accueilli fraîchement cette idée des « cent jours ».

« Le dialogue social, ça prend du temps », avait réagi lundi le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux. En sortant de l’Élysée, il a rappelé attendre « évidemment que les syndicats reviennent » pour discuter notamment de l’emploi des seniors, tandis que le président de la confédération des PME François Asselin évoquait leur retour la semaine suivant le 8 mai.  

« À côté de la plaque »

Mais avec l’aide des ténors du gouvernement, il s’agit pour l’exécutif d’amorcer immédiatement l’offensive de sortie de crise.  

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a souhaité « un projet de loi fort » sur l’immigration, ajourné pour cause de contestation sociale et en l’absence de garantie du vote des députés du parti de droite Les Républicains (LR). « Je suis sûr qu’avec Les Républicains on peut s’entendre sur cette question », s’est-il avancé.

Des voix LR avaient pourtant manqué pour le projet de loi reportant l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans. L’exécutif avait dû engager la responsabilité du gouvernement, sauvé à neuf voix près.

De son côté, le ministre du Budget Gabriel Attal s’est engagé à « continuer à bâtir un plan Marshall pour les classes moyennes », avec des mesures sur les salaires et les services publics.  

Lundi soir, le président de la République avait également évoqué comme chantiers la santé, l’éducation ou la lutte contre la délinquance et la fraude.  

La première ministre Élisabeth Borne présentera sa feuille de route la semaine prochaine en conseil des ministres, selon son entourage.

Une manière d’occuper le terrain pour passer enfin à la suite d’un deuxième quinquennat entravé par la crise politique et sociale des retraites ?

« Restreindre les préoccupations des Français à la seule question des retraites, ce serait ça être à côté de la plaque », a affirmé le porte-parole du gouvernement Olivier Véran, résumant l’état d’esprit d’un exécutif qui rêve de fermer cette parenthèse.

« Bruit sans consistance »

Car la contestation reste forte malgré la validation de la loi par le Conseil constitutionnel vendredi.  

Selon le ministère de l’Intérieur, 24 000 personnes ont manifesté lundi soir en France pendant l’allocution du président Macron, en tapant sur des casseroles.  

« Symboliquement, avec ces “casserolades”, les manifestants veulent couvrir par leur vacarme festif une parole présidentielle qui est perçue par eux comme une forme de bruit sans consistance et sans contenu », explique à l’AFP Pierre Lefébure, politiste de l’université Paris Nord.

Immédiatement après son allocution, le secrétaire général de l’intersyndicale CFDT, Laurent Berger, avait fustigé « un discours de la méthode pour une dixième fois mais rien de concret ».  

Mais pendant que les syndicats et les oppositions réagissaient à ses propos lundi soir, Emmanuel Macron avait entrepris une promenade nocturne dans le quartier Montparnasse. Interpellé par des passants, il a entonné en pleine rue un chant pyrénéen, Le refuge, en leur compagnie, selon une étonnante vidéo diffusée sur les réseaux sociaux et dont l’authenticité a été confirmée par son entourage. De quoi cultiver l’image d’un président imprévisible.  

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