Anders Behring Breivik, le Norvégien de 32 ans qui a reconnu être le responsable de l'explosion d'Oslo et du massacre à l'arme à feu qui a coûté la vie à 86 personnes dans l'île d'Utoya, avait planifié son coup longtemps à l'avance.

Dans un manifeste de 1500 pages qu'il a publié sur l'internet peu avant le carnage, il décrit avec force détails la haine qu'il éprouve à l'égard des musulmans.

Breivik, que les autorités norvégiennes qualifient de «fondamentaliste chrétien», y martèle qu'il a le «multiculturalisme» en horreur. «Nous devons prendre le contrôle politique et militaire de l'Europe afin d'implanter des politiques favorisant une culture conservatrice», écrit-il. Il réclame également le déclenchement d'une guerre civile «pour défendre l'Europe contre la domination musulmane».

Carrément inconnu des policiers avant les événements de vendredi, il a été membre actif du Parti du progrès norvégien (le Fremskrittspartiet) de 2002 à 2006. Cette formation, considérée par le passé comme étant d'extrême droite, a milité pour l'adoption de lois anti-immigration et antimusulmans.

Son plan, selon les détails contenus dans le manifeste, était soigneusement préparé depuis au moins l'automne 2009, affirment les médias norvégiens.

Une tuerie de 90 minutes

Le 22 juillet à 12h51, il a écrit ceci dans la section journal du manifeste: «Je crois que ceci sera ma dernière entrée». Quelques heures plus tard, il débarquait lourdement armé d'un fusil automatique et d'une arme de poing dans l'île d'Utoya, où avait lieu un camp d'été de l'aile jeunesse du Parti travailliste, formation au pouvoir en Norvège.

Pendant 90 minutes, il a froidement et méthodiquement abattu ses cibles, tirant même sur celles qui cherchaient à s'enfuir à la nage.

La police norvégienne étudie la piste voulant qu'il ait volontairement attiré les policiers vers le centre-ville d'Oslo en y faisant exploser sa bombe, afin d'avoir les coudées franches dans l'île d'Utoya.

À l'arrivée des policiers d'élite dans l'île, Breivik s'est rendu pacifiquement.

Message sur YouTube, Facebook, Twitter

Peu avant de passer à l'acte, Anders Behring Breivik a également mis en ligne sur YouTube une vidéo de 12 minutes intitulée «Les chevaliers du temple 2083». Il y déclare qu'une guerre civile visant à «expulser l'islam d'Europe» est en branle depuis 1999, et qu'elle s'arrêtera en 2083, date de la «Déclaration d'indépendance européenne». Il justifie ses gestes en affirmant qu'en 2025, «la plupart des villes d'Europe seront majoritairement musulmanes».

Le tueur y fait également l'apologie de «Chevaliers du temple», qui ont défendu le christianisme en Europe depuis l'an 688. Il s'illustre comme étant lui-même un de ces chevaliers, dans une photo de lui où il apparaît en tenue de combat, mettant un ennemi invisible en joue.

Anders Behring Breivik a également laissé des traces sur Facebook et Twitter, ou a largement cité Machiavel, Kant et John Stuart Mill, ses auteurs préférés. «Une personne convaincue a autant de force que 100 000 personnes qui n'ont que des intérêts», a-t-il déclaré sur Twitter, paraphrasant une phrase célèbre John Stuart Mill.

«C'est un type qui a beaucoup réfléchi et qui a lu énormément. Ce n'est pas un fou, même si ce qu'il a commis est complètement détraqué», croit Khartan Laupstad, un Osloïte rencontré lors d'une veillée funèbre tenue devant la cathédrale d'Oslo.

Dimanche soir, le journal norvégien VG a toutefois révélé que le discours intellectuel dont se réclame Anders Behring Breivik ne pourrait être qu'une vulgaire façade. Certains paragraphes de son manifeste sont en fait des «copier-coller» quasi intégraux du célèbre manifeste d'Unabomber, publié en 1995 par le New York Times et le Washington Post.