Les Palestiniens se résignent à poursuivre les négociations avec Israël jusqu'au terme imparti de neuf mois, afin de ne pas porter la responsabilité de l'échec attendu, mais s'apprêtent à porter leur cause devant les instances internationales dès l'expiration de ce délai.

«Nous nous sommes engagés à poursuivre les négociations pendant neuf mois, quoi qu'il arrive sur le terrain», a déclaré le président palestinien Mahmoud Abbas dans une entrevue exclusive à l'AFP le 17 novembre, au sujet des pourparlers de paix relancés fin juillet sous l'égide du secrétaire d'État américain John Kerry.

«Nous irons jusqu'au bout des neuf mois, et ensuite nous prendrons la décision appropriée», a-t-il ajouté, en allusion à une éventuelle reprise des démarches d'adhésion de la Palestine à des organisations internationales, comme le lui permet son statut d'État observateur à l'ONU depuis le 29 novembre 2012.

«Nous avons accepté de geler toute démarche aux Nations unies en échange de la libération par Israël de tous les prisonniers» incarcérés avant les accords de paix d'Oslo de 1993, en quatre fois, a rappelé M. Abbas.

Plus explicite, Hanane Achraoui, membre du Comité exécutif de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), a appelé jeudi à anticiper sur l'échec des négociations en relançant immédiatement les procédures à l'ONU.

«Israël avait promis aux Américains de ralentir la construction dans les colonies. Non seulement il ne l'a pas fait, mais il l'a poussée au maximum», a déploré Mme Achraoui, citant la mise en chantier de milliers de logements dans les colonies depuis la reprise des négociations.

«Nous aurions dû assurer notre adhésion à ces agences et traités internationaux pour garantir nos droits. À présent, nous devrions nous dépêcher de le faire», a-t-elle déclaré. «Nous devrions au moins déposer des plaintes, ce qui est différent de demander l'adhésion».

La Palestine a voté pour la première fois en tant qu'État à l'ONU le 18 novembre, lors de l'élection d'un juge du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), un épisode qui «va renforcer l'assise de l'État de Palestine dans l'arène internationale», s'est félicité son représentant Riyad Mansour.

«Ce vote fait avancer l'État de Palestine d'un pas vers l'accession tant attendue au statut de membre à part entière des Nations unies», a estimé le ministre des Affaires étrangères Riyad al-Malki.

Celui qui quittera la table aura tort

Mais dans l'immédiat, les Palestiniens sont contraints de poursuivre les pourparlers, malgré l'absence de progrès tangibles et l'aggravation de la situation, qui ont conduit la délégation conduite par Saëb Erakat, vétéran du processus de paix, à présenter une démission collective, repoussée par le président Abbas.

Mais le numéro 2 de la délégation, Mohammad Chtayyeh, a affirmé vendredi à l'AFP qu'il ne reviendrait pas sur sa démission.

«Je n'ai vu aucun sérieux de la part d'Israël au cours des négociations depuis trois mois», a-t-il indiqué. «C'est pourquoi je suis déterminé à ne plus participer aux négociations».

Selon l'ambassadeur de Palestine à l'UNESCO, Elias Sanbar, «il y a énormément d'actes pour nous obliger à sortir, à claquer la porte, pour pouvoir dire ''les Palestiniens ne veulent pas la paix et donc maintenant laissez-nous faire ce que nous voulons''».

Le militant pacifiste israélien Gershon Baskin relativise, rappelant que «les ruptures, les menaces de quitter la table, la démission des négociateurs - toutes ces tactiques sont communément utilisées dans les négociations, en particulier celles à échéance fixe».

Mais il faut se préparer à un échec, prévient Gershon Baskin, coprésident du Centre israélo-palestinien de recherche et d'information (IPCRI), «d'autant plus que bien peu de gens de part et d'autre imaginent un succès».

Dans ce cas, prévoit-il dans le Jerusalem Post, les Palestiniens transporteront le conflit sur «l'arène des Nations unies et de leurs nombreuses agences et institutions».

Dès le début du processus de paix en 1991, «une règle avait été imposée par l'intermédiaire américain», a expliqué M. Sanbar dans un débat sur France 24: «Quoi qu'il arrive à la table des négociations, celui qui se lèvera de table et qui sortira sera rendu responsable de l'échec».

C'est pourquoi selon lui, «les Palestiniens doivent rester à table pour la durée des neuf mois».