Les présidents Barack Obama et Hassan Rohani se sont parlé au téléphone vendredi, un contact sans précédent à ce niveau entre les États-Unis et l'Iran depuis la révolution islamique de 1979.

«À l'instant, je viens de parler avec le président iranien Rohani», a déclaré le président Obama lors d'une intervention à la Maison Blanche peu après 15H30.

Il s'agissait d'une annonce aussi inattendue que spectaculaire alors que les États-Unis et l'Iran ont rompu leurs relations diplomatiques en 1980, dans la foulée de la révolution islamique l'année précédente.

M. Rohani, qui a pris ses fonctions le mois dernier après avoir bénéficié du soutien des réformateurs, a multiplié depuis les ouvertures envers l'Occident, à rebours des diatribes enflammées de son prédécesseur ultra-conservateur Mahmoud Ahmadinejad. Ses déclarations «constructives» ont été relevées par Washington.

«Nous avons discuté de nos tentatives en cours de parvenir à un accord sur le programme nucléaire iranien», a ajouté le dirigeant américain.

Le gouvernement iranien a ensuite confirmé cet appel, annoncé également sur son compte Twitter par le président iranien quasiment au moment où son homologue américain prenait la parole.

Les deux présidents «ont insisté sur la volonté politique de résoudre rapidement la question nucléaire et de préparer la voie pour résoudre d'autres questions ainsi que de coopérer sur les affaires régionales», a annoncé le site internet de la présidence à Téhéran.

Selon le site, les deux présidents se sont aussi mis d'accord pour confier à leurs chefs de la diplomatie - le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif et le secrétaire d'État américain John Kerry - la mission de préparer «dès que possible» les conditions pour une «coopération nécessaire».

Première discussion directe entre des dirigeants américain et iranien depuis plus de 30 ans, l'entretien téléphonique a eu lieu alors que M. Rohani «était en route pour l'aéroport en quittant New York». Il achevait cinq jours de visite à l'occasion de l'assemblée générale des Nations unies.

Selon un haut responsable américain s'exprimant sous couvert de l'anonymat, c'est M. Rohani qui a demandé à parler à M. Obama avant de quitter les États-Unis. De même source, tous deux ont discuté via des interprètes mais se sont souhaité au revoir en farsi pour M. Obama et en anglais pour M. Rohani.

«Nous sommes conscients de toutes les difficultés qui nous attendent», a ajouté M. Obama, trois jours après avoir prononcé à l'ONU un discours dans lequel il s'était dit disposé à donner une chance à la diplomatie pour tenter de résoudre le dossier nucléaire, contentieux majeur entre Téhéran et l'Occident.

«Le simple fait que (cet appel) était le premier contact entre des présidents américain et iranien depuis 1979 illustre la profonde méfiance régnant entre nos deux pays», a remarqué M. Obama.

Mais cette conversation, trois jours après un rendez-vous manqué entre les deux présidents à New York en marge de l'assemblée générale des Nations unies, «montre aussi une possibilité de surmonter cette histoire difficile», a estimé M. Obama.

«Je pense qu'il y a une base pour une solution» avec Téhéran, a-t-il assuré. Les États-Unis et leurs alliés soupçonnent la république islamique de vouloir se doter d'une bombe nucléaire sous couvert d'un programme civil, ce que l'Iran dément.

Jeudi à New York, MM. Kerry et Zarif avaient discuté du nucléaire lors d'une rencontre historique.

Celle-ci s'était déroulée à l'issue d'une réunion déjà sans précédent entre M. Zarif et ses homologues des grandes puissances - dont M. Kerry- durant lesquels tous s'étaient accordés pour de nouvelles négociations sur le nucléaire iranien à Genève les 15 et 16 octobre prochain.

Lors de son séjour new-yorkais, M. Rohani a multiplié les gestes de bonne volonté, affichant sa volonté de dialogue avec Washington.

Il a aussi condamné «le massacre des juifs par les nazis», prenant le contre-pied de M. Ahmadinejad qui avait nié l'Holocauste à la tribune des Nations unies, tout en ajoutant que ce «crime» ne justifiait pas «l'occupation» israélienne également «condamnable».

MM. Obama et Rohani étaient tous deux au siège de l'ONU à New York mardi, alimentant les rumeurs d'une poignée de main entre les deux dirigeants.

Elle n'a finalement pas eu lieu, bien que les États-Unis y aient été disposés selon un haut responsable américain. De même source, les Iraniens avaient décliné une proposition de rencontre informelle, estimant qu'elle serait «trop compliquée à réaliser à l'heure actuelle».