La perspective de voir François Hollande accéder à la présidence française fait grincer des dents plusieurs dirigeants européens conservateurs. Au point, semble-t-il, de les pousser à boycotter de concert le candidat socialiste dans l'espoir de torpiller sa campagne.

La révélation en fin de semaine par Der Spiegel d'un «pacte» informel liant à ce sujet la chancelière allemande Angela Merkel à ses homologues espagnol, italien et anglais a fait grand bruit, même si les principaux intéressés ont démenti.

Selon l'hebdomadaire allemand, ces élus s'alarment de la possibilité de voir un dirigeant socialiste prendre la tête de la deuxième économie en importance de la zone euro et «ne veulent pas lui donner de l'importance en lui réservant le tapis rouge» avant le premier tour du scrutin français.

Leurs réserves s'inspirent en partie de la volonté déclarée de François Hollande de revoir, en cas de victoire, le traité d'austérité budgétaire avalisé la semaine dernière par les pays membres de l'Union européenne.

Angela Merkel, qui a fait de la rigueur budgétaire la condition de toute nouvelle aide aux pays en crise de la zone euro, ne veut pas revenir sur le sujet. C'est en partie pourquoi elle a apporté, il y a un mois à Paris, un soutien remarqué à son homologue français, Nicolas Sarkozy, avant même son entrée en campagne.

Un porte-parole de la chancelière a nié dimanche qu'une décision commune a été prise de boycotter François Hollande, mais il a confirmé du même souffle qu'aucune rencontre n'était prévue avec la chancelière.

Lors d'un passage à Londres, la semaine dernière, le candidat socialiste a rencontré le chef de l'opposition travailliste, mais pas le premier ministre conservateur David Cameron. Bien que la Grande-Bretagne n'appuie pas le nouveau traité budgétaire européen, ses dirigeants n'apprécient guère les visées régulatrices du candidat socialiste, qui a souligné que la finance était son principal adversaire lors de son premier grand rassemblement politique.

Théorie du complot

Dimanche, François Hollande a fait savoir qu'il revenait au peuple français de choisir ses dirigeants. «Nous sommes une grande nation, un grand pays, qui ne se fait pas commander ses choix par des chefs d'État et de gouvernement amis, mais extérieurs à notre démocratie», a-t-il relevé.

Son directeur de campagne, Pierre Moscovici, dénonçant une «pression conservatrice inédite dans l'histoire de l'Europe», a rappelé que l'Allemagne et la France avaient pour tradition de recevoir les candidats des deux principaux camps politiques en période électorale.

La droite française a cherché à ridiculiser l'idée d'un pacte anti-Hollande entre dirigeants européens en accusant le socialiste «d'imaginer un complot à son encontre».

La porte-parole du président français, Nathalie Kosciusko-Morizet, a déclaré que le politicien de gauche se cherchait un «responsable» pour expliquer son «problème de crédibilité en Europe».

Le président français, en déplacement hier dans l'Aisne, a déclaré qu'il n'avait «jamais» abordé la question d'un éventuel boycottage de François Hollande avec ses homologues européens.

«Les dirigeants, vous ne croyez pas qu'ils ont autre chose à faire que de faire des pactes ou des choses comme ça?», a-t-il demandé avant de relever que le candidat socialiste a «peu voyagé» et «ne se rend pas compte qu'on est dans un monde ouvert».

Les attaques soutenues de la droite contre François Hollande n'ont pas permis au président sortant de reprendre l'avantage dans les sondages, le dirigeant socialiste continuant de caracoler loin devant, selon une nouvelle étude parue dimanche.