(Port-au-Prince) Le Haut-Commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU a demandé vendredi à la communauté internationale d’envisager « d’urgence le déploiement d’une force d’appui spécialisée » en Haïti, où les gangs font vivre un « cauchemar » aux habitants.

« La police nationale d’Haïti a besoin d’un soutien international immédiat », a déclaré lors d’une conférence de presse à Port-au-Prince Volker Türk, demandant « à la communauté internationale d’envisager d’urgence le déploiement d’une force d’appui spécialisée dans des délais précis ».

À l’issue de sa visite officielle de deux jours dans le pays, le responsable onusien a déploré l’extrême violence des gangs et les violations flagrantes des droits des Haïtiens qui en découlent.

« Les gens sont harcelés et terrorisés par des bandes criminelles pendant des mois sans que l’État ne puisse y mettre fin. Cela ne peut être décrit que comme un cauchemar », a déclaré par ailleurs dans un communiqué Volker Türk, qui fait état de l’usage par les gangs « de tireurs d’élite qui tuent sans discernement toute personne entrant dans leur champ de vision ».

L’avocat autrichien a regretté, depuis l’aéroport de la capitale, que « plus de 500 000 enfants vivant dans des quartiers contrôlés par les gangs (aient) du mal à accéder à l’éducation », rappelant « qu’au moins 18 policiers ont été tués depuis le début de l’année à cause de la violence des gangs ».

Dans le seul quartier de Brooklyn, à Cité Soleil, une commune très pauvre et densément peuplée située dans la région métropolitaine de Port-au-Prince, la violence des bandes armées a, au cours du deuxième semestre de 2022, causé 263 meurtres et au moins 57 viols collectifs de femmes et de filles y ont été recensés, selon un rapport de l’ONU publié vendredi.

Contrôlant plus de la moitié du territoire national haïtien, ces gangs enlèvent quotidiennement des citoyens, exigeant des dizaines voire des centaines de milliers de dollars aux proches de leurs victimes, le plus souvent agressées sexuellement pendant leur captivité.

En octobre, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres avait relayé un appel à l’aide du premier ministre haïtien Ariel Henry, demandant au Conseil de sécurité d’envoyer une force multinationale d’urgence pour aider la police haïtienne « débordée » par la violence des gangs.  

Si quelques pays ont indiqué être prêts à soutenir une telle mission, aucun ne semble prêt à en prendre la tête. Les États-Unis et le Canada, vers qui tous les yeux se sont tournés, se sont montrés très prudents.

À l’issue de sa visite en Haïti, M. Türk a également mis en cause vendredi le rapatriement massif de migrants haïtiens vers leur pays d’origine et le traitement « humiliant » infligé à beaucoup d’entre eux.

Les « crises multiples » qui poussent de nombreux habitants à fuir le pays « ne permettent pas un retour sûr, digne et durable des Haïtiens en Haïti », a-t-il déclaré. Malgré cela, « 176 777 migrants haïtiens ont été rapatriés l’année dernière », a-t-il souligné dans un communiqué publié par son bureau.

« Permettez-moi de le souligner de nouveau : le droit international […] interdit le refoulement et les expulsions collectives sans une évaluation individuelle de tous les besoins de protection avant le retour » dans le pays d’origine, a insisté M. Türk.