Face à la fronde sociale en Colombie, les ministres ont proposé lundi, en guise de soutien au président Juan Manuel Santos, leur démission collective afin de lui permettre, s'il le souhaite, de remanier le gouvernement.

«Les membres du cabinet ministériel colombien ont remis leur poste à la disposition du président pour qu'il puisse, en toute liberté, procéder aux changements qui lui paraîtront utiles», a annoncé le gouvernement dans un communiqué, tout en apportant «son appui total» au chef de l'État.

La proposition de démission du cabinet, qui comprend les ministres mais aussi des hauts fonctionnaires, a été annoncée à l'issue d'une réunion de travail au palais présidentiel à Bogota.

Cette démarche survient alors que le pouvoir a été confronté à une crise sociale sans précédent depuis l'élection en 2010 de M. Santos, un dirigeant de centre-droit, avec notamment un mouvement important de protestation paysanne.

Lancé il y a deux semaines, la grogne des paysans, qui réclament davantage de moyens, un meilleur accès à la terre et la révision d'accords internationaux de libre échange, s'est ajoutée à celles d'autres corporations comme les camionneurs, les mineurs indépendants, avec le soutien des étudiants et des centrales ouvrières.

Des manifestations organisées jeudi dernier ont été émaillées de violence, notamment à Bogota et à Medellin, seconde ville au nord-ouest du pays, avec un bilan d'au moins deux morts, près de 150 blessés et 40 arrestations.

À la suite de cette flambée de tensions, le président Santos, probable candidat à sa réélection l'année prochaine, avait ordonné l'envoi de troupes militaires pour sécuriser la capitale et débloquer les barrages routiers édifiés par les manifestants.

En fin de semaine, des accords partiels signés par le gouvernement avec une partie des paysans a permis un relatif apaisement, avec une levée progressif des barrages, qui ont affecté 20 des 32 régions de Colombie.

Selon le politologue Jairo Libreros, la crise actuelle «n'est pas seulement la plus forte que rencontre M. Santos avec les secteurs sociaux», mais peut se transformer «en facteur négatif en vue de la réélection».

«Un changement de cabinet peut beaucoup l'aider, s'il arrive à former une équipe qui se montre plus attentive aux régions», a ajouté M. Libreros, soulignant aussi l'importance de la coalition de partis actuellement au pouvoir.

L'éventuelle réélection du chef de l'État, qui doit se prononcer sur sa candidature avant novembre, est également liée à l'issue du processus de paix engagé depuis l'an dernier avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), la principale guérilla du pays, en lutte depuis près d'un demi-siècle.