La Coupe des Confédérations de football, prise à contre-pied par un mouvement historique de révolte sociale, a révélé un autre visage du Brésil et suscite des interrogations à un an du Mondial-2014, qui devait consacrer l'image dynamique d'un pays émergent confiant dans son avenir.

Malgré les craintes initiales sur les retards des stades, ce galop d'essai avant le retour de la Coupe du Monde à la Mecque du «futebol» a été un succès sportif couronné dimanche par la brillante victoire du Brésil sur l'Espagne championne du monde.

Malgré quelques couacs, l'organisation a dans l'ensemble bien fonctionné.

Mais au vaste chantier d'infrastructures qui attend encore le pays est venu s'ajouter l'immense défi social et politique lancé par un mouvement de protestation soutenu par les trois quarts des Brésiliens.

Pour le galop d'essai du Mondial, le gouvernement avait concocté un solide plan de sécurité pour parer aux débordements de partisans violents, contenir le crime organisé ou empêcher une attaque terroriste...

Mais pas pour faire face à la poussée d'exaspération sociale aussi puissante qu'inattendue d'une jeune génération urbaine révoltée par les dépenses du Mondial, l'indigence des services publics de base et la corruption d'une classe politique honnie.

Le gouvernement brésilien et la FIFA comptaient tourner avec la Coupe des Confédérations la bande-annonce idyllique d'une fête colorée au pays chaleureux et dynamique du football-samba, sur fond de success-story socio-économique.

Le monde entier a assisté en direct à un tout autre film et découvert un visage moins exotique du Brésil. Le tout pimenté par des images-chocs d'affrontements entre groupes radicaux et policiers militaires aux méthodes brutales. Jets de pierre contre gaz lacrymogènes, balles en caoutchouc et coups de matraque. Partisans suffoquant et choqués à leur arrivée aux stades.

Beaucoup craignent, y compris la FIFA, que les manifestations ne durent et reprennent en vigueur très bientôt lors des Journées mondiales de la Jeunesse catholique et de la visite du Pape François du 23 au 28 juillet..

Voire qu'elles ne se réactivent l'été prochain pendant le Mondial, qui sera suivi à l'automne par des élections présidentielle et législatives périlleuses pour les élus de tous bords.

«Bien sûr que cette situation est perturbante. Ave ce qui s'est passé, certains touristes qui prévoyaient de venir au Brésil pourraient changer d'avis», a reconnu Marco Polo del Nero, vice-président de la Confédération brésilienne de football (CBF).

Quelque 600 000 partisans étrangers sont attendus pour le Mondial, 30 fois plus que lors de la Coupe des Confédérations.

Et les organisateurs estiment que 3,8 millions de Brésiliens voyageront également entre les 12 villes organisatrices de ce pays continent 17 fois plus grand que l'Espagne.

Le Brésil fascine par ses beautés naturelles, son climat tropical, sa musique, l'art de ses footballeurs.

Mais s'y déplacer est cher est compliqué. La violence y demeure très élevée (10 homicides pour 100 000 habitants par an). Les hôtels affichent souvent des prix exorbitants pour une qualité médiocre.

«Je suis certain que le Coupe du Monde sera un succès. J'ai confiance dans les organisateurs et dans la sécurité», a malgré tout assuré vendredi le président de la FIFA, Sepp Blatter.

En attendant, les manifestations ont déjà porté un coup à l'industrie touristique. Les hôtels de Rio ont connu un taux d'annulation de 27% pendant la Coupe des Confédérations, selon l'Association brésilienne de l'Industrie et des Hôtels (ABIH).

Elles ont eu, surtout celles qui ont dégénéré, «un impact négatif sur l'image du pays», déplore le président de l'ABIH, Erico Fermi.

«Mais nous n'allons pas permettre qu'une minorité gâche la fête», déclare-t-il à l'AFP. Selon lui, le Brésil a encore beaucoup de temps pour renverser la situation, informer la population de tous les bénéfices du Mondial pour le tourisme et le pays en général.

«En 2014, la sécurité autour des stades sera beaucoup plus forte que maintenant. Il n'y aura plus de surprises comme cette fois-ci», estime Marcos Guterman, auteur du livre «Le football explique le Brésil».

Le Brésil avait achevé très en retard quatre des six stades de la Confédération.

Pour le Mondial, il lui en reste six autres à livrer le 31 décembre dernier délai, à Sao Paulo, Cuiaba, Porto Alegre, Curitiba, Manaos et Natal.

Le gros point noir du pays, ce sont les transports. Les aéroports sont pour la plupart vétustes et sous-dimensionnés pour un trafic aérien domestique qui a augmenté de 120% en une décennie. Mais comme le pays est immense, les routes en mauvais état, et les trains de passagers inexistants, l'avion n'a pas d'alternative.

Côté logement, Rio est lancée dans une course contre la montre pour construire à temps 36 hôtels, tout comme Recife qui prévoit 10 000 nouvelles chambres d'ici onze mois...