Les Uruguayens se rendaient aux urnes dimanche pour le premier tour de l'élection présidentielle, dont l'immense favori est l'ex-guérillero José Mujica, fort du bilan économique favorable du premier gouvernement de gauche de l'histoire de ce petit pays fondé en 1828.

Plus de 2,5 millions d'électeurs étaient appelés à voter jusqu'à 19H30 (17H30 HAE) pour désigner le successeur de Tabaré Vazquez, élu en 2004 et qui ne peut pas se représenter. Les premiers sondages à la sortie des urnes étaient attendus à partir de 20H30 (18H30 HAE).

D'après les dernières enquêtes d'opinion, Mujica, 74 ans, ne serait qu'à un ou deux points de la barre des 50% des suffrages exprimés, nécessaire pour être élu dès le premier tour.

L'hypothèse la plus probable est cependant celle d'un second tour le 29 novembre entre ce cofondateur de la guérilla urbaine des Tupamaros, et l'ancien président libéral Luis Alberto Lacalle (1990-1995), âgé de 68 ans et crédité de 30 à 33% des intentions de vote.

Mujica, blessé par balles en 1970 et emprisonné toute la durée de la dictature (1973-1985), pourrait devenir le deuxième ancien guérillero à prendre le pouvoir par les urnes en Amérique latine, après le président du Nicaragua Daniel Ortega.

Ce passé effraye encore une part de l'électorat conservateur.

«Ils veulent transformer l'Uruguay en pays communiste, socialiste. J'espère qu'il (Mujica) ne gagnera pas, car je ne vote pas pour des séditieux, des voleurs et des assassins», déclarait ainsi dimanche Raquel Rodriguez, retraitée de 82 ans, après avoir voté pour Pedro Bordaberry (centre-droit), troisième dans les sondages et fils de l'ancien dictateur Juan Maria Bordaberry.

Mais les analystes dépeignent Mujica davantage comme un réformiste que comme un révolutionnaire.

Cet ancien ministre de l'Agriculture (2005-2008) a promis de prolonger l'action du gouvernement sortant, qui a divisé le chômage par deux grâce à une croissance soutenue et renforcé les droits des minorités.

Il a encore vanté samedi «la manière de gouverner» du président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, chef de file de la gauche modérée latino-américaine, lors d'une dernière conférence de presse très cadrée, avec questions posées par écrit, après les polémiques provoquées par certaines de ses déclarations.

Ce septuagénaire au style vestimentaire informel et à la gouaille populaire a notamment qualifié ses voisins argentins de «totalement irrationnels» et affirmé que «la terre appartient à la nation».

Son principal adversaire, Luis Alberto Lacalle, a lui aussi traîné comme un boulet ses propos de début de campagne, lorsqu'il avait déclaré qu'il allait couper les dépenses publiques «à la tronçonneuse».

Les Uruguayens devaient également renouveler les deux chambres du parlement, où la gauche pourrait conserver sa majorité, et se prononcer sur deux référendums.

Le premier vise à autoriser le vote par correspondance des Uruguayens vivant à l'étranger.

Le second propose l'annulation de la loi de «caducité», qui a longtemps empêché toute poursuite contre les policiers et militaires coupables de crimes durant la dictature.

Même si plus de 230 disparitions ont été recensées, seuls dix anciens militaires et policiers ont été jugés jusqu'ici, parmi lesquels le dernier dictateur, Gregorio Alvarez, condamné jeudi à 25 ans de prison.

Les partisans du oui étaient proches de recueillir la majorité requise des 50% selon les derniers sondages.