Les pays de l'UE ont désapprouvé lundi l'assassinat d'un responsable du Hamas à Dubaï, mais sans mettre en cause directement Israël qui est soupçonné de l'avoir organisé et en concentrant leurs critiques sur l'utilisation de passeports européens dans cette opération.

Le meurtre de l'un des fondateurs de la branche armée du Hamas, Mahmoud Al-Mabhouh, «soulève des questions qui sont profondément dérangeantes» pour l'Union européenne, indique un texte au contenu soigneusement pesé, adopté par les chefs de la diplomatie lors d'une réunion à Bruxelles. Les ministres se sont gardés de pointer directement du doigt la responsabilité d'Israël, plusieurs d'entre eux faisant valoir que rien n'était prouvé à ce jour, tout en estimant que cette opération «ne peut pas contribuer à la paix et à la stabilité au Moyen-Orient».

Selon une source diplomatique, «Israël n'est pas nommé mais le message est très clair» à l'égard de l'État hébreu, dont le ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman se trouvait lundi en visite à Bruxelles.

Ce dernier a rencontré plusieurs responsables européens en réitérant la position officielle de son gouvernement sur cette affaire embarrassante: «Rien ne prouve qu'Israël est impliqué», a-t-il affirmé dans un communiqué publié à Jérusalem.

Les ministres européens ont réservé leurs mots les plus durs pour l'utilisation par le commando à Dubaï de faux passeports utilisant les identités de citoyens européens.

«L'UE condamne fermement l'utilisation de passeports falsifiés de pays membres de l'Union européenne et de cartes de crédits, obtenus via le vol d'identités de citoyens européens», indique leur texte.

Selon la police de Dubaï, des membres du commando qui a assassiné l'un des fondateurs de la branche armée du Hamas, Mahmoud Al-Mabhouh, retrouvé mort le 20 janvier dans un hôtel, détenaient des passeports britanniques, irlandais, français et allemand. À ses yeux, il ne fait guère de doute que le Mossad est derrière ce meurtre.

Lundi, les capitales européennes ont accentué la pression sur l'État hébreu.

À Paris, le président français Nicolas Sarkozy a fait part de sa «condamnation sans appel» de «l'exécution» de Dubaï, lors d'une conférence de presse commune avec le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas.

«Ce genre d'événement ne peut qu'attiser les tensions et n'amène rien de positif. La France est une démocratie et on ne peut pas accepter ça», a affirmé M. Sarkozy.

Le ministre britannique des Affaires étrangères David Miliband a promis d'aller «au fond des choses» dans l'enquête sur l'utilisation de passeports et souligné à l'attention de l'État hébreu l'importance de respecter «les règles de l'État de droit».

Les critiques européennes ne devraient pas dépasser toutefois le stade des protestations verbales, selon un diplomate. M. Miliband a ainsi souligné la nécessité de maintenir la coopération entre son pays et l'État hébreu.

L'affaire survient à un moment où les Européens s'efforcent d'encourager une relance des négociations de paix israélo-palestiniennes et de peser sur leur issue aux côtés des États-Unis, alors qu'ils se contentent à ce jour surtout d'être les bailleurs de fonds des Palestiniens.

Dans une tribune de presse, les chefs de la diplomatie espagnole et française, Miguel Angel Moratinos et Bernard Kouchner, ont ainsi estimé lundi que les Européens devaient proposer un «calendrier de négociations» sur le statut final de l'État palestinien et «une conférence au sommet pour la paix».