(Paris) Les bourses européennes ont connu leur pire séance depuis six mois jeudi, prenant peur après le ton nettement plus agressif qu’attendu de la Banque centrale européenne tandis que les perspectives économiques dégradées tourmentaient Wall Street.  

Les places de la zone euro ont accusé le coup : Paris a cédé 3,09 %, Francfort 3,28 % et Milan 3,45 %, leur pire chute depuis au moins six mois. Londres a reculé plus modestement (-0,95 %), avec le ton plus accommodant de la Banque d’Angleterre.

Au lendemain de la Réserve fédérale américaine, qui avait déjà bousculé Wall Street, les marchés américains cédaient encore plus de terrain à la suite d’indicateurs économiques médiocres : le Dow Jones reculait de 2,48 %, le S&P 500 2,64 % et le NASDAQ de 3,06 %.  

Dernière d’une longue série, la Banque centrale européenne n’a guère innové par rapport aux autres banques centrales : elle a augmenté ses taux directeurs mais de manière plus modeste que lors de ses précédentes réunions (0,5 point de pourcentage).

Si les marchés ont paniqué, c’est surtout en observant que l’institution avait revu « énormément à la hausse » ses projections d’inflation pour les prochaines années. En conséquence, des hausses de taux plus fortes et régulières sont attendues dans les prochains mois, relève Nicolas Leprince, gérant d’Edmond de Rothschild AM.  

La chute des actions s’est accompagnée d’une flambée du coût du crédit pour les États. L’intérêt de la dette italienne à 10 ans passait à 4,13 %, contre 3,85 % la veille. L’écart se creusait nettement avec le taux de la dette allemande à 10 ans, la référence en Europe, qui atteignait 2,07 %.  

À l’inverse, le coût de l’emprunt pour les États-Unis baissait légèrement à 3,44 %, signe de la crainte de l’arrivée d’une récession pour la première économie mondiale.  

Les indicateurs économiques du jour ont en effet été très mauvais, au lendemain de l’avertissement de la Fed sur la robustesse de l’économie américaine : les ventes au détail ont reculé plus qu’anticipé au mois de novembre tandis que la production industrielle en novembre, mesurée par la Fed, a ralenti de 0,2 %, plombée par l’activité manufacturière.  

Mercredi, la Réserve fédérale américaine avait donné le ton. Elle a certes réduit comme attendu le rythme de son resserrement monétaire mais a signifié qu’elle s’attendait désormais à ce que son principal taux directeur dépasse 5 % l’an prochain, un niveau plus élevé que celui indiqué précédemment.

Jeudi, les banques centrales de Suisse et de Norvège ont aussi délivré un message similaire, alors que la Banque d’Angleterre est apparue plus divisée.  

En Asie, les Bourses ont aussi accusé le coup après la chute des ventes au détail en Chine en novembre, plus sévère que prévu (-5,9 % sur un an). Cela a contribué à la débandade des valeurs du luxe en Europe, dont Kering -5,76 % ou Hermès (-5,10 %) à Paris.  

Technologie plie sous les taux 

Les grands noms du secteur de la technologie, très sensibles aux hausses de taux, accusaient le coup comme Meta (Facebook) qui perdait 4,50 %, Microsoft (-3,20 %) ou Netflix (-7,36 %). La déprime des ventes au détail affectait aussi Amazon, le numéro de la distribution en ligne (-4,01 %).

En Europe, le fabricant de semi-conducteurs STMicroelectronics a chuté de 4,88 % et le spécialiste allemand des logiciels SAP, de 4,32 %.  

L’euro au plus haut depuis six mois 

L’euro et le dollar sortaient renforcés et la livre affaiblie jeudi d’une série de réunions de banques centrales.  

La BCE et la Fed ont opté pour un message déterminé sur leur volonté de continuer de monter les taux, là où la BoE s’est montrée plus prudente.  

L’euro reculait de 0,47 % face au billet vert, à 1,0633 dollar, mais prenait 1,27 % face à la livre à 87,07 pence vers 11 h 45 (heure de l’Est).

Le pétrole reculait nettement après ses forts gains depuis le début de la semaine : le baril de WTI américain cédait 2,23 % à 75,56 dollars et le baril de Brent de la mer du Nord de 1,86 % à 81,13 dollars vers 12 h 45 (heure de l’Est).