L'offensive en cours dans le nord de l'Irak, la plus vaste lancée à ce jour contre le groupe armé État islamique (EI), a fait reculer les djihadistes, dont l'un des principaux chefs a été tué par des frappes aériennes selon Washington.

Des milliers de personnes bloquées depuis l'été sur le mont Sinjar, dans la province de Ninive, devaient commencer à être évacuées vendredi au lendemain de la fin du siège de l'EI, brisé par les forces kurdes avec l'appui de nombreux raids de la coalition internationale.

«Les peshmergas ont libéré environ 70 % de la zone du mont Sinjar, mais le sud est toujours sous contrôle de l'EI», a indiqué à l'AFP Faisal Salmeh, un habitant.

Ce succès est intervenu au deuxième jour d'une offensive d'envergure des forces de sécurité et des peshmergas pour regagner du terrain perdu depuis juin, quand l'EI s'est emparé de vastes territoires à la faveur de la déroute de l'armée irakienne.

La victoire kurde a été amplifiée par l'annonce concomitante par des responsables américains de la mort récente de plusieurs «dirigeants (djihadistes) importants et intermédiaires» en Irak.

Le Pentagone n'a pas fourni leur identité, ni la date et le lieu de leur décès, mais un responsable américain a cité sous couvert de l'anonymat le nom d'Abou Muslim al-Tourkmani, considéré comme l'adjoint pour l'Irak du «calife» Abou Bakr al-Baghdadi.

La coalition menée par les États-Unis a intensifié sa campagne de frappes de façon spectaculaire cette semaine pour soutenir l'offensive terrestre des forces anti-djihadistes, qui s'approchent maintenant de Tal Afar, ville prise par l'EI en juin.



Les djihadistes «s'apprêtent à fuir»

Selon des habitants, c'est une unité d'élite de l'armée qui mène cette opération depuis jeudi soir. «J'entends des explosions et des tirs, même parfois des avions de chasse», a déclaré Abou Hussein, instituteur dans cette ville située à 60 km à l'est de Sinjar. «Dans mon quartier, je vois que beaucoup de djihadistes s'apprêtent à fuir».

Située au sud du mont éponyme à proximité de la frontière syrienne, Sinjar est le symbole de la tragédie des Yazidis.

Contraints de fuir cet été devant l'avancée des djihadistes, qui considèrent cette minorité kurdophone comme hérétique, des dizaines de milliers de Yazidis avaient trouvé refuge sur la montagne dans des conditions dramatiques pendant des semaines avant d'être évacués. Mais certains y sont bloqués depuis quatre mois.

C'est après le drame de Sinjar que les États-Unis s'étaient lancés dans la lutte contre l'EI via une campagne aérienne qui dure depuis plus de quatre mois et s'est élargie à la Syrie après la mise en place d'une coalition internationale.

Depuis début août, plus de 1300 raids aériens ont été menés, dont plus de soixante rien que cette semaine en appui de l'attaque en cours dans le nord de l'Irak, lancée depuis Rabia, près de la frontière syrienne, et Zoumar sur les rives du lac de Mossoul.

«Progrès significatifs»

Selon Masrour Barzani, fils du président de la région autonome du Kurdistan et responsable régional pour la sécurité, la fin du siège de Sinjar représente «l'offensive militaire contre l'EI la plus importante et la plus réussie» pour les forces kurdes.

Le Pentagone s'était également félicité jeudi «des progrès significatifs (accomplis récemment) pour enrayer l'avancée de l'EI».

Pour les djihadistes, il s'agit d'un nouveau revers après leurs échecs devant la raffinerie de pétrole Baïji, la plus importante d'Irak, et Jourf Al-Sakhr, dont la libération a permis aux forces irakiennes de sécuriser les routes de Bagdad à Kerbala qu'ont empruntées sans incident début décembre des millions de chiites à l'occasion d'un grand pèlerinage.

Mais l'EI tient toujours fermement la deuxième ville d'Irak, Mossoul, où ils ont d'ailleurs creusé des tranchées et des fortifications, et contrôle la quasi totalité de la vaste province occidentale d'Al-Anbar, frontalière de la Syrie.

Dans ce pays, l'impact de la lutte anti-djihadistes semble avoir un impact bien plus minime, même si elle a permis d'éviter la chute de la ville kurde de Kobané, à la frontière turque.

La nature intriquée de la guerre civile, qui oppose les forces gouvernementales à des rebelles dont le spectre va des «modérés» soutenus par l'Occident aux ultra-radicaux de l'EI ou de la branche locale d'Al-Qaïda, rend plus difficile la coordination des frappes aériennes de la coalition avec des forces sur le terrain. D'autant que le régime de Bachar Al-Assad, que l'Occident juge infréquentable, a profité de la montée en puissance de l'EI en Syrie pour se présenter comme le seul rempart face aux djihadistes.