L'opposition syrienne a salué comme «un pas» vers la démocratie la décision de la Ligue arabe de suspendre la participation de la Syrie, une décision conspuée par les partisans du président Bachar al-Assad, qui ont manifesté dimanche après avoir attaqué plusieurs ambassades.

Au lendemain de la décision de la Ligue, son secrétaire général, Nabil al-Arabi, en visite à Tripoli, a déclaré que l'organisation panarabe étudiait désormais «la mise en place d'un mécanisme pour protéger les civils en Syrie».

De son côté, la Syrie a appelé à la tenue d'un sommet arabe urgent pour «remédier à la crise» qui secoue le pays depuis mars. Elle a également invité dans un communiqué officiel les pays arabes à envoyer des ministres pour s'enquérir de la situation sur le terrain et superviser l'application du plan de sortie de crise proposé par la Ligue arabe.

Des dizaines de milliers de fidèles du président syrien se sont rassemblés dimanche matin dans le centre de Damas pour dénoncer la décision arabe, aux cris de «Le peuple veut Bachar al-Assad».

Dans la nuit de samedi à dimanche, des centaines de partisans du régime ont attaqué les ambassades de l'Arabie saoudite, du Qatar et de la Turquie à Damas, ainsi que des missions diplomatiques turques et françaises à Lattaquié et Alep, entraînant des protestations de ces quatre pays.

La Turquie a décidé d'évacuer les familles de ses diplomates et ses personnels non essentiels.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), des militants pro-démocratie ont tenté d'organiser des contre-manifestations, mais ils ont essuyé les tirs de la sécurité, qui ont fait six morts à Hama et un autre à Deir Ezzor.

En outre, les forces de l'ordre ont tué encore quatre civils dimanche, trois à Homs (centre), haut lieu de la contestation, et un autre dans la région d'Idleb (nord-ouest), tandis que des déserteurs présumés ont tué deux agents de sécurité à Homs, selon l'OSDH.

Samedi, la Ligue arabe a suspendu la participation de la Syrie à ses réunions et l'a menacée de sanctions, un camouflet sévère pour Damas, en raison du refus du régime d'appliquer comme promis le plan arabe qui prévoit en premier lieu un arrêt des violences.

Après l'annonce de cette décision, des manifestants ont saccagé l'ambassade saoudienne à Damas, et d'autres sont montés sur le toit l'ambassade qatarie pour y planter le drapeau syrien.

Au Liban, un millier de Syriens pro-Assad ont aussi manifesté en portant des portraits d'Assad et de son allié chiite libanais Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah.

«La décision des ministres de la Ligue arabe n'est pas surprenante, car ce sont les mêmes qui avaient demandé une intervention militaire en Libye et contribué ainsi au massacre de plus de 50 000 Libyens innocents», a dénoncé le quotidien gouvernemental syrien Techrine.

Le Conseil national syrien (CNS), qui regroupe la plupart des courants de l'opposition, s'est félicité des décisions arabes, constituant selon lui «un pas dans la bonne direction, et une accusation claire du régime syrien qui commet des assassinats et des destructions».

Samedi, 18 des 22 membres de la Ligue ont appelé à des sanctions économiques et politiques contre Damas et invité l'opposition à se réunir au siège de la Ligue arabe au Caire dans trois jours pour des consultations.

Le CNS s'est dit «prêt à négocier la transition dans le cadre de la Ligue arabe, d'une manière à ce que Bachar al-Assad remette le pouvoir à un gouvernement démocratique représentatif du peuple syrien, qui ne comprendra aucun élément du régime dont les mains ont été tachées de sang».

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a salué la décision «forte et courageuse» de la Ligue arabe de suspendre la Syrie de l'organisation.

La Turquie, déplorant «l'attitude du gouvernement syrien» a demandé à la communauté internationale d'agir d'une «même voix» face à la situation en Syrie.

En revanche, la Russie continue d'honorer ses contrats de livraison d'armes à la Syrie, puisqu'aucune décision internationale ne l'en empêche, a indiqué dimanche un haut responsable russe du secteur cité par Interfax.

Et le président Assad a rendu hommage à la Russie, qui s'est placée «au côté du peuple syrien», lors d'un entretien avec le patriarche orthodoxe russe Kirill, en visite à Damas.

Selon l'ONU, la répression a fait plus de 3500 morts en Syrie depuis le début de la révolte mi-mars.