Un juge espagnol a inculpé lundi 13 membres de l'ETA et de la guérilla colombienne des Farc pour avoir préparé des assassinats de personnalités colombiennes en Espagne, dont l'actuel président Alvaro Uribe, en bénéficiant selon lui d'une «coopération gouvernementale vénézuélienne».

Les Farc ont demandé à l'organisation indépendantiste basque de collaborer à des projets d'attentats en Espagne de personnalités colombiennes, lors de formations réciproques au maniement d'explosifs et à la guérilla urbaine dans les jungles de Colombie et du Venezuela, selon le juge Eloy Velasco.

Ces projet d'attentats visaient à l'origine l'ex-président Andrés Pastrana, l'ambassadrice en Espagne de 2002 à 2008, Noemi Sanin, l'actuel vice-président, Francisco Santos, l'ex-maire de Bogota, Antanas Mockus, et «plus récemment l'actuel président Alvaro Uribe», indique le magistrat dans son procès verbal.

Les 13 personnes inculpées sont six membres présumés de l'ETA et sept des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes), tous en fuite, selon ce document dont l'AFP a reçu copie.

Le juge a demandé au gouvernement espagnol d'effectuer les démarches nécessaires auprès des autorités cubaines «et en particulier du Venezuela» pour qu'elles coopèrent à l'extradition de certains des suspects résidant, selon lui, dans ces pays.

L'enquête, assure-t-il, a «mis en évidence la coopération gouvernementale vénézuélienne à la collaboration illicite entre les Farc et l'ETA».

Celle-ci s'est manifestée «spécialement dans le cas d'Arturo Cubillas Fontan», un membre présumé de l'ETA nommé en 2005 à un poste de responsabilité au ministère vénézuélien de l'Agriculture, marié à une Vénézuélienne, Goizeder Odriozola Lataillade, ayant elle-même eu des responsabilités dans l'administration du président Hugo Chavez.

Cubillas Fontan était, selon le magistrat, «responsable du collectif de l'ETA dans cette partie de l'Amérique depuis 1999».

À ce titre, il «coordonnait les relations entre les Farc et l'ETÀ et la participation de membres de l'ETA à des cours de maniement d'explosifs et de techniques de guérilla urbaine», écrit le magistrat espagnol.

Le juge Velasco avait ouvert son instruction le 1er décembre 2008 à la demande du parquet, en grande partie sur la base de documents trouvés dans l'ordinateur de Raul Reyes, l'ex-numéro deux des Farc, tué en mars 2008 en Equateur dans une opération contre la guérilla colombienne.

Cette opération avait déclenché une grave crise diplomatique entre la Colombie et l'Équateur.

Le président vénézuélien de gauche Hugo Chavez, qui entretient des relations très tendues avec le conservateur Alvaro Uribe, s'était solidarisé avec l'Equateur et avait massé des troupes près de la frontière colombienne.

Le juge Velasco ne détaille pas dans son procès verbal le supposé degré d'avancement des projets d'assassinats des Farc en Espagne, en particulier en ce qui concerne le président Uribe.

Il assure qu'un membre des Farc avait effectué en Espagne «une surveillance de l'ambassadrice de Colombie et des itinéraires de l'ex-président colombien Andrés Pastrana et informé qu'il ne serait pas difficile de commettre des attentats contre ces objectifs, à condition de compter sur l'aide de l'ETA».

Le juge cite aussi un courriel du 27 septembre 2003 attribué à Raul Reyes et adressé à Pedro Antonio Marin, chef-fondateur des Farc mort en 2008: «Les amis de l'ETÀ ont récemment reçu une formation (...). On leur a parlé de la possibilité de nous aider pour des opérations en Espagne et dans d'autres pays. On a parlé de Pastrana, Noemi et Bernardo Guttierez. Ils disent qu'il n'auront pas beaucoup de difficultés à localiser les deux premiers».