Dans les deux salles de la petite école publique de Balan s'agglutinent un peu plus de 250 écoliers qui reçoivent chaque jour un plat de nourriture offert par le Programme alimentaire mondial (PAM) en Haïti. Ce sera souvent leur unique nourriture de la journée.

À l'exemple des écoliers de ce village à 30 km à l'est de Port-au-Prince, plus d'un demi-million de jeunes bénéficient d'un repas quotidien à l'école dans ce pays où la disette n'est jamais loin.

«Depuis un an que la cantine a été instaurée, l'effectif n'a cessé de croître», explique le directeur de l'école, Sauveur Noël. 

«Nous sommes en novembre et nous recevons encore de nombreuses demandes d'inscription. Les gens savent que depuis une année nous donnons à manger aux enfants. Alors...», explique-t-il.

M. Noël, 66 ans, confie avoir lui-même fréquenté cette école, «il y a très longtemps». «Aujourd'hui, je devrais être à la retraite, mais je suis revenu pour servir ma communauté et accompagner les enfants de mon village», admet-il.

Il y a un an, il a fait appel au PAM pour apporter une aide à son établissement, oublié par l'État et abandonné par la communauté.

«Quand nous sommes arrivés ici, nous avons tout suite compris qu'il était important d'aider l'école, mais nous avons exigé un minimum d'hygiène. Une toilette et une petite cuisine ont ainsi été érigées», fait remarquer Nancy Exilas, une fonctionnaire haïtienne du PAM.

«Depuis que nous avons admis l'école au programme, les activités ont repris et les enfants sont devenus plus performants», note-t-elle.

Dans un millier d'écoles publiques et religieuses du pays, le Programme fournit une ration alimentaire aux petits Haïtiens vivant dans les zones où règne la plus grande insécurité alimentaire.

Quand le repas est prêt, il est servi dans les salles de classe. Les enfants mangent avec appétit leur ration de riz et de haricots, arrosés d'une sauce à la sardine.

Dans la cour, des parents attendent de recevoir leur portion. «Je vous assure que c'est ici que nous mangeons aussi, PAM c'est notre dieu à Balan», dit une femme dont les deux enfants sont à l'école. C'est le cas de beaucoup de gens du quartier qui vivent de cette cantine. «Il faut mettre une clôture et laisser les enfants manger en paix», dit une autre.

Dans les 1.400 écoles où le PAM intervient, les stocks de nourriture pourraient s'épuiser dans quelques semaines, ce qui laisserait sans repas 530.000 enfants dans les écoles primaires d'Haïti, prévient l'organisation qui recherche 13 millions de dollars pour continuer ce programme.

«Si ce programme s'arrêtait, ce serait catastrophique», commentent professeurs et parents. Après le repas servi à la mi-journée, les écoliers de l'école de Balan se remettent au travail.

La cacophonie règne dans les deux salles où cohabitent six classes différentes: certains répètent des formules arithmétiques, d'autres apprennent des phrases de littérature tracées sur un vieux tableau. Les plus petits chantent.