L'Iran a accepté lundi, en accord avec la Turquie et le Brésil, d'échanger à l'étranger une partie de son uranium faiblement enrichi contre du combustible, mais les Occidentaux ont affiché leur méfiance, Washington restant malgré tout déterminé à sanctionner Téhéran.

Fruit d'une médiation du Brésil et de la Turquie, membres non permanents du Conseil de sécurité, l'accord a été signé à Téhéran par les trois chefs de diplomatie en présence des présidents iranien, Mahmoud Ahmadinejad, et brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva, et du Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan.

Il intervient après des mois de blocage entre Téhéran et les Occidentaux, qui soupçonnent l'Iran de chercher à se doter de l'arme atomique sous couvert de programme nucléaire civil, ce que Téhéran dément, et cherchent à faire adopter à l'ONU des sanctions renforcées contre ce pays.

L'accord prévoit l'envoi de 1 200 kilos d'uranium iranien faiblement enrichi en Turquie (3,5%) pour y être stocké et échangé dans le délai maximum d'un an contre 120 kilos de combustible enrichi à 20% nécessaire au réacteur de recherche de Téhéran, selon le ministère iranien des Affaires étrangères.

Mais l'Iran, qui a ainsi renvoyé la balle dans le camp des Occidentaux et de la Russie, a dans le même temps affiché sa détermination à poursuivre l'enrichissement d'uranium, une activité pour laquelle il a été sanctionné trois fois par le Conseil de sécurité.

L'Iran «continuera à enrichir l'uranium à 20% sur son territoire», a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Ramin Mehmanparast.

En février, Téhéran avait lancé la production d'uranium enrichi à 20% accélérant la mobilisation du groupe des Six (Etats-Unis, Chine, France, Grande-Bretagne, Russie, Allemagne) pour faire adopter de nouvelles sanctions à l'ONU.

L'Iran a de son côté indiqué qu'il communiquerait dans un délai d'une semaine à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) la proposition d'échange d'uranium.

L'AIEA lui a justement demandé dans la soirée de confirmer par écrit son accord avec «les dispositions mentionnées dans la déclaration» signée avec le Brésil et la Turquie.

Sans catégoriquement rejeter l'accord, la Maison Blanche a affirmé qu'il ne changeait «rien aux démarches entreprises (par Washington) pour que l'Iran respecte ses engagements, et cela inclut les sanctions». Le département d'Etat a même évoqué des «progrès importants» dans la recherche d'une résolution.

«Les Etats-Unis et la communauté internationale éprouvent toujours de graves inquiétudes» sur ce dossier nucléaire, a dit la Maison Blanche, estimant que l'offre devrait être «soumise à l'AIEA avant qu'elle ne puisse être évaluée par la communauté internationale».

Washington a ensuite annoncé qu'il allait «consulter largement» dans les prochains jours, y compris la Turquie et le Brésil, au sujet de l'accord.

Autre membre des «Six», la Russie a salué l'accord mais jugé nécessaires de nouvelles consultations pour répondre aux questions en suspens.

Londres a estimé que Téhéran demeurait une «source d'inquiétude», alors que la chef de la diplomatie de l'Union européenne Catherine Ashton a estimé que l'accord répondait «partiellement» aux demandes de l'AIEA.

Israël, ennemi juré de l'Iran, a dénoncé des «manoeuvres». L'ONU a de son côté noté que les résolutions du Conseil de sécurité «devaient être appliquées».

Mais pour les deux parrains de l'accord, le dialogue reste la seule voie pour mettre un terme au bras de fer entre l'Iran et l'Occident.

«La diplomatie sort victorieuse aujourd'hui», a déclaré le président du Brésil. «Il est possible avec le dialogue d'instaurer la paix et le développement».

Pour le chef de la diplomatie turque Ahmet Davutoglu, il n'y a «plus besoin de sanctions».