La ville russe de Belgorod a été la cible d’une nouvelle série de bombardements ukrainiens jeudi en fin de journée, quelques heures après que les écoles de la région eurent reçu l’ordre de prolonger leur fermeture pendant les vacances en raison du risque de nouvelles attaques.

Le gouverneur de Belgorod, Vyacheslav Gladkov, a déclaré qu’au moins deux personnes avaient été blessées lors de ce dernier bombardement, alors que des chaînes Telegram diffusaient ce qui semblait être des images de voitures endommagées dans la ville.

« Selon les données préliminaires, il y a deux victimes. Un homme a été blessé par un éclat d’obus à l’avant-bras, l’autre a été blessé par un éclat d’obus au tibia », a-t-il déclaré.

« Notre système de défense aérienne a fonctionné au-dessus de Belgorod et de son district. Dix cibles aériennes ont été abattues à l’approche de la ville », a-t-il ajouté.

Si le Kremlin s’efforce depuis près de deux ans de cacher à la population la réalité de la guerre, la frappe sur la ville de Belgorod le 30 décembre a montré que le territoire et les civils russes pouvaient être entraînés dans le conflit.

Il s’agit du plus lourd bilan en Russie depuis le 24 février 2022, date du déclenchement de l’invasion de l’Ukraine : 25 morts et une centaine de blessés dans cette cité de 335 000 habitants, à 50 km de la frontière avec l’Ukraine.

Elle avait été frappée au lendemain d’un bombardement massif de villes ukrainiennes ayant fait 55 morts dont au moins 32 à Kyiv, le bilan le plus sanglant pour la capitale ukrainienne depuis le début de la guerre.

Jeudi, après de nouvelles frappes les jours précédents, les autorités régionales de Belgorod ont été contraintes de prolonger les vacances scolaires dans les écoles de la municipalité et de localités environnantes.

« Je rapporte les décisions qui ont été prises (à l’issue d’une réunion entre responsables, NDLR) : prolonger les vacances scolaires du 9 au 19 janvier », a déclaré sur Telegram le gouverneur Viatcheslav Gladkov.

Dans les collèges techniques et les universités situés dans les localités concernées par les mesures, « il est recommandé d’organiser des sessions à distance. Si nécessaire, prolongez les vacances », a-t-il ajouté.

M. Gladkov n’a pas précisé les raisons de cette décision d’urgence mais sa région semble particulièrement ciblée par les représailles ukrainiennes à la suite des bombardements russes.

Quatre morts dans des frappes russes en Ukraine

Au moins quatre personnes ont été tuées dans des bombardements russes dans l’est et le centre de l’Ukraine, ont annoncé jeudi les autorités ukrainiennes, après plusieurs jours d’attaques massives de Moscou qui ont fait des dizaines de morts et de blessés.

Dans la région de Kirovograd, une attaque russe au missile « sur une installation industrielle » a fait un mort et « huit blessés » à Kropyvnytskiï, a indiqué sur Telegram le gouverneur Andriï Raïkovytch.

L’opérateur national Ukrenergo a reconnu dans un communiqué que l’une de ses infrastructures avait été « endommagée ».

« Des lignes électriques à haute tension ont été coupées à la suite de l’attaque. Des consommateurs domestiques et les chemins de fer sont privés d’électricité », a précisé Ukrenergo, qui a toutefois assuré que la situation était « sous contrôle ».

Dans la région méridionale de Kherson, un habitant de 61 ans est mort à la suite d’une frappe russe à Stanislav, a déploré de son côté le gouverneur régional, Oleksandre Prokoudine.

Sur la ligne de front est, près de Donetsk, une frappe russe a fait un mort et un blessé à Katerynivka, selon Vadym Filachkine, le gouverneur de la région éponyme.

La veille, des attaques russes ont tué une personne et blessé trois autres dans la région de Donetsk, épicentre de combats actuels et où les forces de Moscou ont visé 11 villages, a déploré sur Telegram jeudi le ministère ukrainien de l’Intérieur.

Des immeubles résidentiels ou encore un gazoduc et une ligne électrique ont été endommagés, selon cette source.

Si les frappes russes de mardi visant Kyiv, ses environs et Kharkiv avaient pour but notamment, selon les experts, de toucher des usines de production d’armes, l’armée russe mène toujours en parallèle une campagne à bas feux de bombardements sur des installations énergétiques ukrainiennes, en plein hiver.

Par ailleurs, le gouverneur de la région de Dnipropetrovsk a annoncé que deux personnes ont été blessées jeudi par des tirs d’artillerie russe à Nikopol, une ville située le long du fleuve Dniepr qui fait office de ligne de front naturelle entre les armées ukrainienne et russe dans cette zone.

Ces frappes interviennent quelques jours après des bombardements massifs russes sur plusieurs villes d’Ukraine, dont sa capitale Kyiv, qui ont fait des dizaines de morts et de blessés.

Une femme de 84 ans a d’ailleurs succombé à ses blessures à l’hôpital, a indiqué jeudi le parquet régional de Kharkiv, faisant passer le bilan total des frappes de mardi à six morts dans le pays.

En territoire ukrainien occupé par la Russie, une femme a été tuée et un homme sauvé des décombres d’un immeuble à Donetsk, touché par une frappe ukrainienne, ont indiqué jeudi sur Telegram les secours locaux.

La Russie a dit jeudi avoir repoussé une attaque ukrainienne sur la ville de Sébastopol en Crimée annexée, abattant dix missiles dont les débris ont fait un blessé, dans un contexte de multiplication des frappes de part et d’autre.

« Nos militaires ont repoussé une attaque sur Sébastopol. Cela a été l’attaque la plus massive ces derniers temps », a relevé sur Telegram le gouverneur de cette cité Mikhaïl Razvojaïev, installé par la Russie après l’annexion de cette péninsule ukrainienne en 2014.

Selon lui, des fragments des missiles ukrainiens abattus sont tombés dans des zones habitées et ont fait au moins un blessé.

« Dix missiles ukrainiens ont été détruits au-dessus de la péninsule de Crimée par les forces de défense antiaérienne », a confirmé le ministère russe de la Défense.

Le commandement stratégique de l’armée ukrainienne a de son côté affirmé sur Telegram avoir « frappé un poste de commandement des forces d’occupation russes près de Sébastopol ».

La Crimée est une région clé pour la logistique des forces russes qui occupent une partie du sud de l’Ukraine. Cette péninsule est régulièrement la cible de missiles et de drones ukrainiens.

Arrestations en Moldavie de passeurs aidant des Ukrainiens à fuir l’armée

L’Ukraine a annoncé jeudi l’arrestation en Moldavie de passeurs aidant des Ukrainiens, appelés sous les drapeaux, à fuir leur pays, en plein débat sur la nécessité de renforcer les rangs de l’armée pour combattre l’armée russe.

La police ukrainienne a indiqué sur Telegram qu’il s’agissait d’une opération commune avec les forces de l’ordre moldaves. Les deux passeurs moldaves ont été arrêtés alors qu’ils transportaient quatre réfractaires à la conscription militaire en Ukraine.

« Les criminels amenaient les hommes en âge de servir dans l’armée depuis la région (ukrainienne) d’Odessa jusqu’à la frontière avec la Transdniestrie », un territoire séparatiste prorusse en Moldavie, selon la même source.

« De là, ils les conduisaient le long de sentiers forestiers évitant les postes de contrôle […] et ont emmené leurs clients jusqu’à la capitale de la Moldavie » Chisinau, poursuit la police ukrainienne, qui dit que les passeurs monnayaient leurs services entre 4500 et 5000 dollars et trouvaient leur clientèle via des chaînes de messagerie Telegram.

Depuis le début de l’invasion russe, il y a près de deux ans, les hommes ukrainiens âgés de 18 à 60 ans n’ont pas le droit de quitter le territoire, sauf autorisation spéciale.

Les déserteurs sont passibles de peines allant jusqu’à douze ans de prison, tandis que les réfractaires au service risquent cinq ans de détention.

Après deux ans de combats meurtriers et notamment l’échec d’une vaste contre-offensive durant l’été 2023 contre l’armée russe, les forces ukrainiennes ont besoin de remplir leurs rangs.

Parallèlement, des voix s’élèvent dans la société pour réclamer une rotation des troupes déployées en démobilisant celles sur le front depuis longtemps et en enrôlant de nouveaux soldats, qu’il s’agisse de volontaires ou d’appelés. Certains réclament également des mesures pour encourager les Ukrainiens de l’étranger à rentrer combattre pour leur pays.

Un texte pour réglementer ces questions est actuellement entre les mains des parlementaires ukrainiens.

Les principaux passages frontaliers entre Ukraine et Pologne de nouveau bloqués

Les quatre principaux passages frontaliers entre la Pologne et l’Ukraine restaient bloqués jeudi pour le trafic des camions après la reprise dans la matinée du barrage du dernier passage par des agriculteurs polonais.

PHOTO KUBA STEZYCKI, ARCHIVES REUTERS

Des camions bloqués à la frontière entre la Pologne et l’Ukraine, le 4 décembre dernier.

« Après une pause pour la période des fêtes, nous avons repris dans la matinée le blocage du poste de Medyka (sud-est) faute d’un accord par écrit avec le gouvernement », a déclaré à l’AFP Roman Kondrow, un des organisateurs du mouvement de protestation, ajoutant que le blocage allait se poursuivre jusqu’au 3 février.

« Si un accord avec le gouvernement est signé, nous suspendrons notre blocage en attendant que nos revendications soient réalisées », a-t-il ajouté.

Les agriculteurs polonais affirment souffrir toujours de la chute, au début de l’année dernière, des prix résultant des importations de céréales ukrainiennes et réclament des subventions et des prêts bon marché.

Les trois autres principaux passages restent bloqués depuis le début du mois de novembre par les routiers polonais qui protestent contre « une concurrence déloyale » des camionneurs ukrainiens et contre l’assouplissement des règles d’accès à l’Union européenne pour les entreprises de ce pays.

« Nous discutons avec le gouvernement, mais pour l’instant sans résultat », a déclaré jeudi à l’AFP, Rafal Mekler, un des organisateurs des blocages.

Aussi bien les agriculteurs que les routiers laissent passer sur chacun des postes trois camions par heure, ainsi que le trafic de passagers et les transports d’aide humanitaire et militaire à l’Ukraine.

Le temps d’attente pour les camions s’élevait jeudi de 48 heures au poste de Medyka à dix jours au point de passage de Dorohusk.

Le nouveau premier ministre polonais Donald Tusk a déclaré mercredi qu’il essaiera de convaincre les transporteurs « de ne pas utiliser le blocus comme une méthode pour défendre leurs intérêts », tout en soulignant que son gouvernement « fera tout » pour protéger leurs intérêts « dans cette concurrence inégale avec les transporteurs ukrainiens ».

Il a également souligné que le blocus, en particulier en pleine escalade des bombardements et des opérations militaires russes, « ne rendra pas cette tâche », ni les négociations avec Kyiv, plus faciles.

« Je serai plus efficace dans la défense des transporteurs polonais lorsque le blocus cessera […]. Nos arguments seront mieux entendus lorsque la Pologne ne sera pas un pays qui bloque la frontière », a souligné le premier ministre.

Varsovie et Kyiv ainsi que les représentants de l’Union européenne se sont entretenus à plusieurs reprises pour résoudre la crise à la frontière, mais aucun accord n’a été trouvé jusqu’à présent.

Réunion entre l’OTAN et l’Ukraine mercredi sur la défense aérienne

Les ambassadeurs de l’Ukraine et des pays membres de l’OTAN vont se retrouver mercredi à Bruxelles, à la demande de Kyiv qui réclame davantage de moyens de défense aérienne après de récentes frappes russes.

Cette réunion, décidée par le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, à la demande de l’Ukraine, fait suite aux « récentes attaques de missiles et de drones russes contre des civils ukrainiens », a expliqué jeudi le porte-parole de l’Alliance, Dylan White.

PHOTO SAUL LOEB, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Jens Stoltenberg

Les pays de l’OTAN ont déjà fourni « d’importantes quantités de systèmes de défense aérienne à l’Ukraine et sont engagés à renforcer encore les moyens de défense de l’Ukraine », a-t-il ajouté.

La Russie a lancé ces derniers jours l’une de ses plus importantes attaques de missiles et de drones contre l’Ukraine depuis l’invasion de ce pays, le 24 février 2022.

Face à ces attaques, Kyiv réclame davantage de moyens de défense aérienne, de missiles et de drones, auprès de ses alliés occidentaux, qui peinent toutefois à y répondre.

Une aide militaire des États-Unis est toujours bloquée par le Congrès américain en raison de réticences d’élus républicains.

Bombardement de Kyiv du 29 décembre : le bilan record grimpe à 32 morts

Le bilan d’une frappe russe à Kyiv le 29 décembre a atteint jeudi 32 morts, selon les autorités ukrainiennes, qui jugeaient déjà la semaine dernière que ce bombardement était le plus meurtrier pour la capitale en deux ans de guerre.

Le précédent décompte, annoncé la veille après le décès d’un blessé, était de 30 morts.

PHOTO GLEB GARANICH, ARCHIVES REUTERS

« Les équipes médico-légistes de la Direction générale du ministère de l’Intérieur ont identifié deux nouvelles victimes » retrouvées dans les décombres d’un entrepôt, a déploré sur Telegram le chef de l’administration militaire de Kyiv, Serguiï Popko.

Selon lui, « le nombre total de personnes tuées […] le 29 décembre est de 32 » désormais.

Ce jour-là, la Russie a lancé des missiles contre plusieurs villes d’Ukraine, faisant, selon un dernier décompte, 55 morts.

Les 32 personnes tuées à Kyiv l’ont toutes été dans le bombardement d’un entrepôt en lisière du centre-ville.

Le maire Vitali Klitschko avait déjà estimé vendredi que cette frappe était la plus meurtrière pour la capitale ukrainienne « en termes de pertes civiles » depuis le début de l’invasion russe le 24 février 2022.

La Russie de son côté affirme, comme à son habitude, n’avoir détruit que des cibles légitimes telles des casernes, des entrepôts militaires ou des usines d’armement.

En représailles, les Ukrainiens ont attaqué samedi la ville russe de Belgorod, proche de la frontière, faisant 25 morts. Moscou a répliqué mardi en lançant une centaine de missiles contre l’Ukraine, faisant cinq morts.

Cette escalade intervient alors que le front est largement figé depuis plus d’un an et que ce sont les Russes qui semblent avoir actuellement l’initiative sur le champ de bataille.

Malgré l’aide militaire occidentale, la contre-offensive des forces ukrainiennes de l’été 2023 s’est soldée par un échec.

L’armée russe, elle, intensifie ses frappes de missiles et de drones explosifs pour, selon les experts interrogés par l’AFP, tester et saturer la défense antiaérienne ukrainienne, tout en épuisant ses stocks de munitions occidentales.