(Port-au-Prince) Les négociations en vue de former des autorités de transition en Haïti progressent, a affirmé mercredi une responsable caribéenne, tandis que les États-Unis organisent de nouvelles évacuations pour leurs ressortissants dans ce pays ravagé par la violence des gangs.

Les troubles se sont poursuivis près de Port-au-Prince avec des tirs encore enregistrés en fin d’après-midi, selon un correspondant de l’AFP.

Le couvre-feu nocturne a été prolongé jusqu’à samedi dans le département de l’Ouest qui englobe la capitale, ont annoncé les autorités.

« Les discussions continuent, je suis sûre que cela prendra un peu de temps. Mais d’après toutes les indications, ça avance », a dit l’ambassadrice du Guyana auprès de l’ONU, Carolyn Rodrigues-Birkett, interrogée sur les pourparlers autour du conseil présidentiel de transition devant prendre les rênes du pays.

EDE/RED, l’une des formations politiques ayant déjà soumis un nom pour la représenter au sein de cet organe, a finalement porté son choix mercredi sur une autre personne, a appris l’AFP auprès du groupe.

Sans président ni parlement – le dernier chef d’État, Jovenel Moïse, a été assassiné en 2021 – Haïti n’a connu aucune élection depuis 2016. Ariel Henry, nommé par M. Moïse, aurait dû quitter ses fonctions début février.

Hélicoptère

Très contesté, M. Henry, qui n’a pas pu regagner son pays après un déplacement au Kenya, a accepté de démissionner le 11 mars.

Le même jour, plusieurs pays et organisations comme la Communauté des Caraïbes, actuellement présidée par le Guyana, s’étaient réunis d’urgence en Jamaïque.  

Un futur conseil présidentiel de transition, devant notamment être composé de représentants de partis politiques haïtiens, avait été annoncé à l’issue de la réunion.

Ce conseil doit tenter de remettre le pays, dont des pans entiers sont aux mains des gangs armés, sur le chemin de la stabilité.

Le département d’État des États-Unis a indiqué mercredi avoir affrété un hélicoptère qui a transporté une quinzaine de ses ressortissants de Port-au-Prince vers la République dominicaine voisine.

« Nous nous attendons à ce que l’hélicoptère fasse plusieurs voyages pour tenter de faire sortir autant de citoyens américains que possible », a dit un porte-parole.

D’après un autre responsable du département d’État, au moins 30 Américains devraient être évacués chaque jour, y compris mercredi, à bord de ces vols, qui se poursuivront en fonction de la situation sécuritaire et de la demande.

L’ambassade de France en Haïti a elle indiqué qu’elle procédait au recensement des Français « souhaitant quitter le territoire haïtien lorsque les conditions le permettront ».

Barrages

Mercredi, un policier affecté à la sécurité du bureau du premier ministre a été abattu, selon le syndicat de police Synapoha.

Et des hommes armés tentent depuis mardi soir de prendre le contrôle de plusieurs quartiers de Pétion-Ville, selon trois habitants de cette commune située en banlieue de la capitale, contactés par l’AFP.

Des riverains ont érigé des barricades dans certaines zones pour tenter de se protéger contre les hommes armés, ce qui a ralenti les activités dans la capitale, ont précisé les résidents.

« Aujourd’hui, il y avait beaucoup de barrages à Port-au-Prince. Par conséquent, le PAM n’a pu livrer de plats chauds que dans 10 des 14 sites que nous avions projeté d’atteindre », a dit sur X le chef du Programme alimentaire mondial en Haïti, Jean-Martin Bauer.

« Nous ferons tout notre possible pour aider, mais nous avons besoin de sécurité », a-t-il ajouté.  

L’insécurité menace aussi les petits commerçants.

« Je suis ruiné. Je n’ai plus rien à vendre. J’ai toujours habité à Pétion-Ville mais je vendais dans le centre-ville de Port-au-Prince. Depuis que l’insécurité monte en flèche, ce n’est plus possible d’aller vendre », a déploré Gérard Vil, un marchand.

Face à la situation chaotique et aux craintes d’un exode massif, le Haut-Commissariat de l’ONU aux réfugiés a rappelé aux États qu’il était « impératif de garantir que les Haïtiens reçoivent la protection internationale du statut de réfugié dont ils pourraient avoir besoin ».  

« Nous réitérons également notre appel à tous les États à ne pas renvoyer de force les personnes vers Haïti, y compris celles dont la demande d’asile a été rejetée », a-t-il insisté.