(Kenscoff) Quinze enfants sont morts dans l’incendie d’un orphelinat insalubre à Haïti, un nouveau drame venant illustrer les graves carences des institutions de prise en charge de l’enfance dans ce pays en crise.  

Deux enfants sont morts dans cet orphelinat dépourvu d’autorisation de fonctionner depuis plusieurs années, et 13 d’asphyxie à l’hôpital de Fermathe, a indiqué à l’AFP la magistrate Raymonde Jean Antoine. L’incendie s’est déclenché après 21 h heure locale jeudi, selon elle.

« D’après les déclarations d’un des enfants, l’origine du feu viendrait de bougies qu’ils avaient allumées pour éclairer leurs chambres car le système électrique » avait « un problème », a indiqué la juge Raymonde Jean Antoine, précisant qu’une enquête était ouverte pour déterminer la cause du désastre et identifier les personnes responsables de l’établissement.

Vendredi matin, la magistrate a procédé dans le bâtiment au constat du décès des deux victimes aux âges indéterminés, tout en recensant les dégâts causés par l’incendie en parcourant l’ensemble des pièces.

L’orphelinat, qui n’avait selon elle plus l’autorisation légale d’opérer depuis 2013, était situé dans un bâtiment insalubre de deux étages, avec des lits superposés – certains en état déplorable – entassés dans de petites chambres, avec un escalier exigu et seulement une porte de sortie ouverte, a constaté l’AFP.

PHOTO CHANDAN KHANNA, AGENCE FRANCE-PRESSE

« Comme des animaux »

« Les conditions dans lesquelles vivaient les enfants sont vraiment, vraiment négligées : nous voyons que les enfants vivaient comme des animaux », a déploré la juge Jean Antoine, ajoutant n’avoir « pas constaté la présence d’extincteurs ».

L’orphelinat de l’Église de compréhension de la Bible, situé à Kenscoff, commune située sur les hauteurs de l’agglomération de la capitale Port-au-Prince, abritait environ 66 enfants, selon Raymonde Jean Antoine. Ces établissements se sont multipliés après le séisme de 2010.

Seuls trois adultes étaient présents sur les lieux au moment du drame.  

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« Ce centre n’a pas d’autorisation de fonctionner », a confirmé vendredi à l’AFP Arielle Jeanty Villedrouin, directrice de l’administration haïtienne de protection de l’enfance (IBESR). « C’est un centre qui, je crois, reçoit de l’argent du secteur religieux, de missionnaires étrangers, je ne sais pas exactement mais donc sans aucune légalité », a déploré Mme Villedrouin.

En marge des enquêtes judiciaires en cours, l’administration publique travaille à « récupérer les enfants survivants, qui sont traumatisés après avoir vécu ce drame, et les placer au centre de transition de l’IBESR où ils auront un encadrement psychosocial », a indiqué Mme Villedrouin.

Début 2019, l’administration avait constaté que seuls 35 des 756 centres d’hébergement de mineurs recensés à travers le pays disposaient d’une autorisation de fonctionnement.  

Quelque 80 % des quelque 27 000 enfants haïtiens actuellement placés en orphelinat ont au moins un parent en vie.  

En 2017, Lumos, organisation créée par l’auteure d’Harry Potter J. K. Rowling, a révélé qu’au moins 70 millions de dollars sont parvenus annuellement à seulement un tiers des orphelinats haïtiens. Une somme estimée après la seule analyse des rapports budgétaires d’ONG étrangères, les comptabilités des missions religieuses n’étant pas été rendues disponibles.  

C’est à Haïti qu’un couple de Français venus adopter a été tué il y a près de trois mois.