Avec l’un des taux de fécondité les plus bas d’Europe, une population vieillissante et une jeunesse qui choisit de plus en plus l’exil, la Grèce vit un déclin démographique sans précédent. Le berceau de la démocratie a connu en 2022 son plus petit nombre de naissances en près d’un siècle. Le gouvernement grec tente désespérément de lutter contre cette chute de la natalité, qu’il qualifie de « danger national ».

Des rues sans enfants

PHOTO LOUISA GOULIAMAKI, REUTERS

Une aînée conduit un quadriporteur dans le village de Díkaia, dans la région d’Orestiáda.

Certains villages n’ont pas enregistré une seule naissance depuis des années. Celui d’Orménio et la municipalité voisine d’Orestiáda, situés près des frontières de la Turquie et de la Bulgarie, témoignent de l’ampleur du phénomène. Selon les données du recensement, la population d’Orestiáda a diminué de 16 % entre 2011 et 2021. Orménio était autrefois rempli d’enfants, mais aujourd’hui ses rues en sont dépourvues et les deux tiers de ses 300 habitants ont plus de 70 ans, souligne le maire du village, Stratos Vasiliadis.

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Pour contrer le vieillissement de la population et stimuler la natalité, Athènes doit dévoiler en mai une série de mesures, dont des allocations familiales, des logements abordables pour les jeunes, des aides financières à la procréation assistée et l’intégration des migrants dans la population active. « Si je vous disais qu’un ministre peut inverser la tendance, ce serait un mensonge, tempère cependant Sofia Zacharaki, ministre grecque de la Cohésion sociale et de la Famille. Mais nous devons continuer d’essayer. »

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Des tombes s’ajoutent au cimetière d’Orménio, où les morts sont plus nombreuses que les naissances.

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Des chats prennent leurs aises devant une boucherie, aujourd’hui définitivement fermée, dans le village de Pentalofos. La ville voisine d’Orestiáda a également beaucoup souffert. Une sucrerie qui fournissait des centaines d’emplois a fermé ses portes, comme des dizaines d’autres entreprises installées dans la municipalité.

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Une adolescente allongée dans des escaliers, à Orménio. Pour les rares jeunes du village, solitude et ennui font partie du quotidien. Nicholas, seul garçon de 13 ans qui y habite, confie passer la plupart de ses week-ends à jouer seul à des jeux vidéo. Il souhaite partir à ses 18 ans. « Je l’enverrai peut-être étudier chez ma sœur en Allemagne », dit son père.

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Devant l’ancienne école d’Orménio, Thodoris Vasiliadis, orthophoniste de 44 ans, organise un atelier d’art pour les enfants des villages voisins. Selon M. Vasiliadis, l’isolement nuit au développement des aptitudes sociales des enfants. Il donne l’exemple d’un garçon qu’il suit, dont le bégaiement s’est accentué faute d’amis à qui parler.

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La nature reprend ses droits sur un terrain de basket abandonné dans le village de Marasia, près de la frontière turque.

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Service commémoratif à l’église d’Orménio. Comme tous les dimanches, la plupart des bancs sont inoccupés lors de la messe. Les trains qui passent par le village avaient l’habitude d’amener des visiteurs, mais aujourd’hui, ils transportent des chars d’assaut à destination de l’Ukraine.

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Des quadriporteurs sont garés devant un café prisé des joueurs de backgammon, dans le village de Díkaia. L’économie grecque s’est redressée ces dernières années, mais la baisse de la natalité constitue, selon le premier ministre Kyriakos Mitsotakis, une « bombe à retardement » pour le système de retraite.

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Arabatzidou Lambrini, Arvanitidou Sofia et Gavriilidou Fotini, trois amies nonagénaires, sont assises sur une place désertée du village de Petrotá, en banlieue d’Orestiáda. « Nous avions l’habitude de nous réunir lors des mariages et des baptêmes. Aujourd’hui, nous nous retrouvons aux enterrements », dit Chrysoula Ioannidou, 61 ans.

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Des cigognes du haut de leur nid, à Orménio. Contrairement à la légende alsacienne, elles n’ont malheureusement amené aucun bébé. Avant même les mesures d’incitation prévues pour mai, le gouvernement grec a créé une allocation de naissance et des avantages fiscaux sur les articles de puériculture, et a bonifié les prestations de maternité du secteur privé. Ces mesures n’ont guère montré de signes d’efficacité.