(Port-au-Prince) Le texte en vue d’une réforme de la constitution haïtienne, soutenue par le premier ministre, a été publié mercredi à l’heure où le pays reste plongé dans une crise politique profonde suite à l’assassinat, le 7 juillet, du président Jovenel Moïse.

« Une nouvelle constitution ne sera pas la panacée pour résoudre tous nos problèmes » a reconnu le premier ministre haïtien, Ariel Henry, « mais si nous arrivons à nous mettre d’accord sur ce mode d’organisation de la gouvernance plus équilibré et plus efficace, ce sera un point de départ pour d’autres convergences autour du devenir de notre pays », a estimé le chef du gouvernement.  

Deux mois après le meurtre non élucidé du chef de l’État dans sa résidence par un commando armé, la classe politique et la société civile restent divisées sur l’organisation immédiate du pouvoir.  

Le gouvernement en place, dirigé de facto depuis juillet par Ariel Henry, milite pour la tenue au plus tôt d’élections générales alors que l’opposition réclame la création d’un régime de transition pour deux ans.  

Outre les scrutins législatifs, en retard depuis 2018, et présidentiel, le gouvernement d’Ariel Henry souhaite faire aboutir cette réforme constitutionnelle, initiée par Jovenel Moïse.  

Rédigé dans les deux langues nationales, français et créole, le texte renforcerait les pouvoirs du président aux dépens des parlementaires.  

Le document prévoit la suppression du poste de premier ministre au profit de la création d’un vice-président, élu en même temps que le président dans un suffrage à un seul tour.  

Cette disposition permettrait à Haïti d’éviter la paralysie de l’action gouvernementale : à chaque changement de cabinet, l’approbation de la politique générale du premier ministre par le pouvoir législatif a toujours été l’objet de longues tractations avec les députés et sénateurs.

Le texte favoriserait aussi la lutte contre la corruption avec la possibilité de poursuites devant les tribunaux de droit commun de hauts fonctionnaires, ministres en fonction et même du président de la République, une fois son mandat achevé.

Ces hauts responsables ne peuvent aujourd’hui être jugés que devant le Sénat, après une mise en accusation de la Chambre des députés, une procédure inutilisée dans le pays gangrené par la corruption.  

« L’immunité n’est pas synonyme d’impunité », a plaidé mercredi Mona Jean, membre du comité de rédaction de la nouvelle Constitution. « Une fonction ne peut pas être une source d’enrichissement illicite », a ajouté l’avocate.

Mercredi, le premier ministre n’a pas évoqué la modalité d’adoption ou de rejet de cette réforme constitutionnelle.

Plébiscité par le président assassiné, Jovenel Moïse, un référendum est prévu à l’agenda électoral pour le 7 novembre mais dès 2020 la procédure avait soulevé des critiques, car elle était accusée de ne pas respecter les dispositions de l’actuelle Constitution.

Rédigé en 1987, après la chute de la dictature des Duvalier, le texte en vigueur déclare que « toute consultation populaire tenant à modifier la Constitution par voie de référendum est formellement interdite ».