À la une du Paris Match du 6 août dernier, Sharon Stone, seins nus, taille cintrée dans un corset ajouré et juchée sur des sandales à plateau, clame haut et fort la pensée de la nouvelle consommatrice sexy: «J'ai 50 ans, et alors!»

Même esprit aux défilés des collections printemps-été 2010 à Milan, qui se sont terminés la semaine dernière. Les designers les plus influents de la planète ont offert aux femmes celles qui ont les moyens de se payer leurs vêtements une mode intensé ment féminine et sexy. Et ce ne sont pas les rédactrices en chef vedettes assises dans la première rangée des présentations qui vont s'y opposer! Parmi ces puissantes glamazones d'âge mûr, il y a la rédactrice en chef du Vogue français, Carine Roitfeld. Véritable gouroute de la branchitude, elle met invariablement ses longues jambes bronzées en évidence grâce à une minijupe et de sublimes sandales vertigineuses à brides enserrant ses fines chevilles.

 

Avoir 50 ans en 2009

«Nous assistons à une redéfinition de l'âge, observe Luc Dupont, professeur au département de communication à l'Université d'Ottawa. Autrefois, atteindre 40 ans coïncidait avec la fin de la séduction. Aujourd'hui, les femmes et même les hommes qui ont grandi avec le culte de la jeunesse ceux de la génération X et les baby-boomers espèrent demeurer sexy jusqu'à leur mort. Bien sûr, la réalité les rattrapera un jour», rappelle-t-il.

N'empêche, des femmes dites couguars qui sont à la recherche de partenaires plus jeunes qu'elles, comme Demi Moore et Madonna, font voler en éclats les images traditionnelles. «Pendant longtemps, l'industrie de la mode s'est adressée aux midinettes pour maintenant s'apercevoir qu'elle avait oublié un énorme segment, celui des femmes de plus de 40 ans», précise Luc Dupont.

Gym, régime, botox...

«Au lieu d'afficher sa richesse, la femme affiche son corps», lit-on dans le Vogue français du mois de septembre. Suffit de jeter un oeil sur Madonna pour contempler les dernières innovations en matière de musculation, de nutrition et de chirurgie plastique.

«Dans une société d'abondance, le contrôle du corps est associé à une réussite sociale», note Mariette Julien, professeure à l'École supérieure de mode de Montréal, à l'UQAM.

Auparavant, la distinction sociale résidait dans la capacité de se procurer des vêtements coûteux. Aujourd'hui, on se distingue socialement en se payant des transformations chirurgicales ou en investissant du temps au gym ou dans les sports pour mieux sculpter son corps et ainsi avoir l'air jeune.

«Dans un monde individualiste, le corps transformé devient une source de gratification, voire un accomplissement personnel, d'où l'importance de la mode qui dévoile le corps, nouvel objet de fierté», fait remarquer la spécialiste, qui est sur le point de publier un ouvrage consacré à l'hypersexualisation de la mode.

«On ne parle donc plus de minceur naturelle, mais de corps travaillé ou construit», renchérit Luc Dupont, docteur en sociologie et spécialiste des questions d'image.

«Les femmes désirent conserver leur taille et demeurer attrayantes après 50 ans pour leur propre satisfaction», croit pour sa part Barbara Atkin, vice-présidente tendances mode, chez Holt Renfrew.

Société des plaisirs

Autre phénomène: à l'heure des divorces en série, les femmes (et les hommes!) refont leur vie à tout âge. Autrement dit, personne ne peut (trop) se laisser aller. «Il suffit d'aller dans les salles de danse à Montréal pour voir à quel point il y a des femmes sexy de 60 ans et 70 ans», constate Mariette Julien.

Sur le plan symbolique, des vêtements sexy envoient un message de disponibilité sexuelle.

«Dans notre société où la valeur dominante est le plaisir, les gens ont tendance à promouvoir le plaisir sexuel dans leur apparence, de la musculature des hommes à la minijupe des femmes», résume la chercheuse en sociologie de la mode.