Changement de stratégie pour les banques alimentaires du Québec: plutôt que de mettre toutes les énergies à trouver de la nourriture quand les tablettes des comptoirs d'aide sont vides - généralement avant les Fêtes, on veut s'organiser pour avoir des denrées toute l'année.

L'idée est de bâtir des liens durables avec l'industrie alimentaire qui deviendrait un partenaire plutôt qu'un pompier.

«Les gens de l'industrie sont les premiers à admettre qu'il y a encore trop de pertes», confie Richard Décarie, président de Banques alimentaires du Québec, l'organisme qui distribue les denrées aux Moissons des différentes régions et à plus d'un millier d'autres comptoirs alimentaires.

«C'est inconcevable qu'il y ait encore des gens qui ont faim au Québec en 2010 parce que nous sommes mal organisés, dit Louise Larivière, directrice des communications pour l'organisme. Ultimement, notre but, c'est qu'il n'y ait plus de gaspillage dans la chaîne.»

Pour y arriver, le regroupement veut mettre sur pied une véritable Bourse des denrées. Cette Bourse mettrait les représentants de l'industrie en contact avec les banques alimentaires.

Par exemple, une entreprise de yogourt qui aurait 1000 pots à donner pourrait l'inscrire en Bourse. Les organismes bénéficiaires, qui seraient à même de récupérer le don, avec toutes les contraintes de transport que cela suppose, pourraient se manifester, virtuellement. Cela simplifierait la vie des détaillants et producteurs qui n'auraient plus à négocier avec quelques organismes différents, toujours en demande.

«Les banques alimentaires ne sont pas là pour quêter, tranche Richard Décarie. Nous voulons récupérer une importante quantité de nourriture qui n'est pas récupérée présentement. Nous voulons devenir un partenaire dans une stratégie de développement durable.»

Les propriétaires de supermarché pourraient aussi inscrire en Bourse les denrées qu'ils retirent de leurs tablettes et les agriculteurs, leurs surplus, au moment des récoltes. Ce qui éviterait qu'un seul comptoir alimentaire se retrouve soudainement avec une quantité si incroyable de choux qu'il finisse lui-même par en mettre à la poubelle...

Les banques alimentaires voudraient aussi que les producteurs agricoles, ou les transformateurs, bénéficient de crédits d'impôt s'ils décident de consacrer une partie de leur production à un don, au départ.

Par exemple, explique Richard Décarie, un agriculteur pourrait avoir 100 hectares de maïs sucré et en faire un supplémentaire qui serait déjà destiné à une banque alimentaire.

Les producteurs laitiers du Québec le font déjà. L'année dernière, ils ont livré plus d'un demi-million de litres de lait aux banques alimentaires du Québec. Le lait est parfois aussi transformé en beurre ou en fromage.

Les producteurs laitiers font partie de la sainte trinité des dons alimentaires ciblés, explique Louise Larivière, avec les pâtes Catelli et Agropur, qui donnent à l'année.

L'organisme souhaite maintenant convaincre d'autres grandes entreprises québécoises de penser aux banques alors qu'elles font leur planification. «On a toujours considéré les banques alimentaires comme étant l'étape juste avant les déchets, dit Richard Décarie. Nous disons qu'elles sont partie intégrante de l'industrie alimentaire.»