Alex Harvey a choisi de renoncer au relais 4 X 10 kilomètres, présenté aujourd'hui, une décision qui a fait des vagues hier au sein de l'équipe canadienne de ski de fond, aux Championnats du monde d'Oslo.

Après avoir appris le retrait de son coéquipier, Ivan Babikov a exprimé sa frustration de manière forte sur son compte de messagerie Twitter. «Il y en a un d'entre nous qui commet la plus grande erreur de sa vie... et j'ai perdu tout respect pour cette personne...», a-t-il écrit en début d'après-midi. Ce message a plus tard été retiré de la page Twitter de Babikov.

Interrogé à ce sujet en fin de soirée à Oslo, Justin Wadsworth, entraîneur-chef de l'équipe, a soutenu qu'il n'y avait pas lieu de faire un plat de cette histoire.

«Ivan est juste un peu déçu, a indiqué Wadsworth en entrevue téléphonique. C'est correct de la part d'Alex de ne pas courir, c'est juste qu'Ivan est un peu frustré qu'on n'ait pas notre meilleure équipe. On alignera une très bonne équipe et les gars se battront aussi fort qu'ils le peuvent.»

Babikov a dû s'expliquer avec son coach. «On a eu un petit meeting à ce sujet, a dit Wadsworth. C'est simplement qu'à ce moment-là, il était vraiment frustré. On en a parlé, et c'est maintenant réglé. Ce n'est pas une grosse affaire.»

Harvey a pris sa décision après sa sortie d'entraînement, hier matin, au cours de laquelle il a noté un léger manque de fraîcheur. Au lendemain de sa conquête de la médaille d'or au relais sprint avec Devon Kershaw, il a jugé qu'il valait mieux préserver ses forces en vue du 50 kilomètres style libre de dimanche, épreuve de clôture des Mondiaux d'Oslo.

«Il veut gagner le 50 km, a dit Louis Bouchard, entraîneur personnel de Harvey. Nos trois gars ont une chance de médaille dimanche: Alex, Devon et Ivan.»

Une journée épuisante

La journée de la victoire (mercredi) a été épuisante physiquement et émotivement.

«Ç'a été costaud comme journée, a fait valoir Bouchard, qui s'est abstenu de commenter la pointe de Babikov. Alex n'a pas eu le temps de faire de sortie de récupération. Il y a eu beaucoup d'activités médiatiques et il ne s'est pas couché avant minuit.»

Bouchard a consulté la littérature scientifique. Les données pointaient vers le repos en vue d'une préparation optimale pour le 50 km, annoncé comme le plus dur de l'histoire avec près de 2000 mètres d'ascension.

«L'horaire est chargé, c'est difficile de dire non au 4 X 10, mais Alex mise beaucoup sur le 50 km, a dit Bouchard. Il sent que les jambes et la forme sont là. Il ne voulait pas détruire tout ça.»

Prérogative de l'athlète, a rappelé Wadsworth. «Il y a toujours des changements, a dit l'ancien olympien américain. Je respecte toutes les décisions. On en discute ensemble. Je leur donne mon input, ils me donnent le leur, et une décision est prise sur ces bases.»

Quel était le point de vue de l'entraîneur-chef? «Mmm... C'est une décision très difficile, tout le monde sait ça. C'est quelque chose de personnel. C'était totalement correct des deux côtés. Les points de vue se valent. Ça peut soulever un débat, mais ce n'est pas une question de vie ou de mort non plus! C'est juste de la course de ski de fond. On aura une bonne équipe.»

Un athlète intense

Ancien membre de l'équipe nationale russe, Babikov, 30 ans, est arrivé au Canada en 2003. Athlète intense, bête d'entraînement, il a dû patienter jusqu'en 2008 avant de pouvoir représenter son pays d'accueil en compétition.

Le 4 janvier 2009, Babikov est devenu le premier fondeur canadien depuis Pierre Harvey à remporter une épreuve de Coupe de Monde, s'imposant lors de la dernière étape du Tour de ski, à Val di Fiemme, en Italie. Aux Jeux olympiques de Vancouver, il s'est classé trois fois parmi les 10 premiers.

Babikov a été plus discret cet hiver, se classant néanmoins sixième à Val di Fiemme, une montée sèche de neuf kilomètres. Jusqu'ici aux Mondiaux, il a fini 15e de la poursuite de 30 km et 30e du 15 km classique.

Le Canada a fini quatrième du 4 X 10 km aux derniers Jeux olympiques de Vancouver. Ce fut une vive déception, car un podium paraissait possible. Harvey, Kershaw, Babikov et George Grey composaient le relais olympique.

Élément fondamental dans le processus de décision de Harvey: les chances de podium du relais canadien à Oslo étaient loin d'être les mêmes. Certes, Harvey, Kershaw et, dans une moindre mesure, Babikov sont dans une excellente condition. Mais il manquait un quatrième maillon à la chaîne pour espérer rivaliser avec les Norvégiens, les Finlandais et les Suédois.

À Oslo, le vétéran Grey a pris le 46e rang de la poursuite et le 57e du 15 km. D'ailleurs, probablement que Len Valjas, un sprinter recrue, aurait été appelé à le remplacer. Finalement, les deux seront du départ avec Kershaw et Babikov.

Le coup de gueule de Babikov étonne dans la mesure où le groupe paraît soudé. Il était le premier à se réjouir de la victoire de Harvey et Kershaw mercredi. Accompagné de tous ses coéquipiers à la cérémonie des médailles, en soirée, c'est lui qui brandissait bien haut l'unifolié.