Les ministres fédéral et provinciaux des Finances se réunissent aujourd'hui à Victoria. Le renouvellement de l'accord de 2004 sur Transfert canadien en matière de santé (TCS) sera l'un des principaux sujets à l'ordre du jour.

Conclu alors que Paul Martin était premier ministre, cet accord prévoyait une augmentation du TCS de 6% par année pendant dix ans. Tout indique que le ministre fédéral, Jim Flaherty, annoncera à ses homologues qu'il veut désormais plafonner la croissance du transfert pour la santé à celle de l'économie. Les ministres provinciaux sortiront probablement de la réunion en accusant le gouvernement Harper d'abandonner les malades à leur sort. Mais, dans ce dossier, c'est Ottawa qui a raison.

La santé est, de loin, le plus important poste de dépenses des provinces. D'année en année, ce portefeuille accapare une part plus importante de leurs dépenses de programmes. Au Québec, cette part est passée de 31% (1990-1991) à 47% aujourd'hui. Si l'on continue de laisser augmenter les dépenses en santé plus vite que la croissance économique (donc plus vite que les revenus de l'État), les gouvernements devront sabrer dans leurs autres missions pour satisfaire l'insatiable bête. Au Québec, les groupes de travail présidés par Jacques Ménard (2007) et Claude Castonguay (2010) ont tous deux conclu que l'augmentation des dépenses de santé devait être limitée à celle de l'économie. «Le rythme de croissance des dépenses publiques de santé est insoutenable (...). Il s'agit là d'une certitude incontournable», affirmait le groupe Castonguay.

Les deux rapports ont été rangé sur la proverbiale tablette mais leurs conclusions n'en sont pas moins pertinentes. D'autant qu'aujourd'hui, après 10 ans de croissance rapide des sommes dépensées pour la santé, on sait que l'argent n'est pas le nerf de la guerre. Québec dépense cette année 12 milliards de plus qu'il y a dix ans. Durant cette décennie, le nombre de médecins a augmenté de 2500. Plus de 200 Groupes de médecine familiale ont été créés. Or, l'accès aux soins de santé demeure difficile, les urgences restent débordées, les personnes âgées poireautent en attendant de recevoir les services dont elles ont besoin.

Le gouvernement Harper prend souvent des décisions pour des raisons idéologiques plutôt que factuelles. Dans le cas présent, toutefois, sa proposition relève du simple bon sens. Limiter la croissance du transfert pour la santé à celle du PIB ne signifie pas qu'Ottawa asphyxiera les provinces. Au cours des prochaines années, l'économie, et donc le TCS, devraient croître d'au moins 4% par année.

Au lieu de crier au meurtre, les provinces devraient elles-mêmes appliquer les freins. Cela nécessitera de prendre des décisions difficiles. Or, comme le soulignait la commission Clair il y a 11 ans, «faire des choix» est «un devoir qu'on ne saurait récuser.»