Depuis quelques années, nous observons une montée vertigineuse des rémunérations des principaux dirigeants des banques, compagnies d'assurances et caisses populaires.

Depuis quelques années, nous observons une montée vertigineuse des rémunérations des principaux dirigeants des banques, compagnies d'assurances et caisses populaires.

Ces excès créent un sentiment de malaise et de gêne dans la population. En effet, les écarts de revenu entre les dirigeants et les travailleurs de la base sont tellement grands qu'ils deviennent une injustice sociale.

Cette situation, qui va d'ailleurs toujours en s'amplifiant, est favorable au développement de comportements criminels dans notre société, lesquels vont éventuellement se manifester de plus en plus, comme dans plusieurs pays où il y a beaucoup d'écart entre les classes sociales.

De plus, il est démontré que la grande majorité des gens riches, par leurs comportements ostentatoires, provoquent des sentiments d'envie. Ces sentiments amènent beaucoup de gens dans une spirale ascensionniste de surconsommation, ce qui crée l'endettement excessif de plusieurs, ce qui est également très mauvais pour l'environnement. Effectivement, et même si on ne le dit pas souvent, la consommation et la dégradation de l'environnement sont intimement liées.

Je ne crois pas que votre rémunération de 1,56 million de dollars soit raisonnable, Mme Leroux. On utilise fréquemment l'argument voulant que d'autres dirigeants de banques ou d'autres compagnies gagnent plus. À mon avis, c'est là une continuelle surenchère qui n'a aucune base véritablement logique.

Même la question de rémunération élevée pour garder les gens compétents, voire exceptionnels, ne tient pas la route car la cupidité est une très mauvaise valeur pour un bon leader.

En fait, la rémunération des dirigeants devrait plutôt être basée, en grande partie, sur les véritables besoins, puis sur des considérations comme la compétence et les responsabilités.

Le revenu d'une personne ne devrait pas dépasser 200 000$ à 300 000$ pour les postes les plus prestigieux. Le premier ministre Charest ne reçoit-il pas 257 000$ comme premier ministre, incluant le salaire versé par le Parti libéral du Québec? À mon avis, ces salaires sont amplement suffisants pour combler tous les besoins raisonnables dans notre société.

Même si vous n'êtes pas la plus haute salariée au Québec, je m'adresse à vous parce que vous êtes la personne la plus susceptible de démarrer un mouvement de recul chez les hauts salariés.

Pourquoi vous? Mais d'abord parce que vous êtes une femme et que les femmes sont habituellement plus connectées aux valeurs humaines que les hommes. Aussi parce que vous êtes dans le monde de la coopération et de la solidarité, qui sont par définition des valeurs communautaires. De plus, dans un mouvement coopératif comme celui que vous dirigez, le partage équitable des profits n'est-il pas à la base des principes de coopération? Finalement, parce que la Caisse d'économie solidaire est ma caisse depuis plusieurs années et que mon compte de banque a toujours été dans une caisse populaire depuis mon enfance.

Si jamais vous acceptiez de renoncer à ce salaire faramineux, vous pourriez provoquer un mouvement d'adhésion à la caisse pour les gens, qui comme moi, cherchent une institution financière et une compagnie d'assurance où on y fait une bonne gouvernance. Une bonne gouvernance est, entre autres, que les dirigeants n'ont pas un comportement cupide.

J'espère, Mme Leroux, que mes arguments auront su vous convaincre des méfaits de comportements financiers prédateurs et des bienfaits d'une approche raisonnable et généreuse sur le plan des rémunérations.

* L'auteur adresse cette lettre ouverte à Monique Leroux, présidente et chef de la direction du Mouvement des caisses Desjardins.