Une éruption volcanique en Islande a semé jeudi une immense pagaille dans le transport aérien en Europe, les cendres qui s'échappent en de gigantesques volutes clouant au sol une bonne partie des avions dans le nord du continent.

«Je n'ai jamais rien vu de pareil !», s'est exclamé Vilhjalmur Eyjolfsson, un fermier de 86 ans, dont les terres voisines du glacier Eyjafjallajokull, sous lequel l'éruption volcanique s'est déclenchée mercredi, ont été recouvertes d'une épaisse couche de cendres grises.

«Il fait sombre partout, même si quelques rayons de lumière parviennent à passer», explique à l'AFP cet agriculteur du sud islandais. «Il y a de la cendre grise partout, c'est comme une épaisse neige de cendres».

C'est la première fois depuis 1918 et l'éruption d'un autre volcan, le Katla, que les cendres volcaniques pleuvent sur son village.

L'immense nuage de cendres dégagé par l'éruption, la deuxième dans l'île volcanique en moins d'un mois, paralysaient largement le trafic aérien jeudi dans et vers le nord de l'Europe. Les espaces aériens, britannique, danois, suédois, néerlandais, et belge étaient ainsi fermés.

Selon l'Organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne, Eurocontrol, la moitié des vols entre l'Amérique du nord et l'Europe devraient être annulés vendredi.

En France, où les premières poussières volcaniques sont arrivées en début de soirée dans le nord, les deux grands aéroports parisiens de Roissy et d'Orly devaient être fermés jeudi à partir de 23H00 (17H00 heure de Montréal).

Quant au premier ministre russe Vladimir Poutine, il a dû ajourner jeudi son déplacement à Mourmansk pour les mêmes raisons.

Le nuage de cendres, poussé par les vents sur le nord de l'Europe, devrait créer des perturbations aériennes pendant encore au moins deux jours, ont averti diverses autorités.

«Nous estimons qu'entre 4 000 et 5 000 vols pourraient être affectés en 24 heures jusqu'à minuit ce soir», a précisé jeudi Kyla Evans, une porte-parole d'Eurocontrol, organisme européen chargé de la sécurité aérienne, avant de rappeler que l'Europe enregistre normalement environ 28 000 vols par jour.

Mais l'éruption, elle, pourrait durer au moins plusieurs semaines, soulignent les experts.

«Une éruption il y a un siècle a duré toute une année, donc ça peut être aussi long que ça», souligne Thorsteinn Jonsson, prévisionniste à l'Institut météorologique islandais. «Cela peut aussi se calmer en deux ou trois semaines, comme cela a été le cas avec d'autres éruptions».

Paradoxalement, l'Islande a été plutôt épargnée au niveau du trafic aérien, les fumées volcaniques fuyant l'île vers le sud-est et le continent européen.

«La situation devrait s'améliorer en Scandinavie, mais les problèmes devraient persister en Grande-Bretagne et en Irlande ce week-end», juge Thorsteinn Jonsson.

Outre le nuage volcanique, l'éruption souterraine, survenue tôt mercredi matin, a déjà entraîné d'importantes inondations. Craignant la montée des eaux et la destruction de maisons et de ponts, les autorités islandaises ont de nouveau évacué 800 personnes jeudi, comme la veille, a indiqué la police.

«800 personnes sont en train d'être évacuées, dont certaines n'étaient revenues chez elles que depuis 24 heures» après avoir été évacuées une première fois mercredi, a déclaré un porte-parole de la police, Vithir Reynisson.

Dans ces zones, «la protection civile a incité les riverains à porter des masques pour éviter d'inhaler des cendres et des poussières volcaniques», a expliqué à l'AFP Kjartan Thorkelsson, le chef de la police locale.

«Dans les endroits les plus touchés, la visibilité ne dépasse pas 50 à 100 mètres», explique-t-il.

Après une série de petits séismes, signes d'activité volcanique, un volcan dans la même zone était entré en éruption le 21 mars, offrant un spectacle grandiose de lave en fusion, mais, cette fois-ci, le danger est bien plus grand.

«Cette éruption est beaucoup plus forte. Elle dure désormais depuis plus de 24 heures et c'est une éruption explosive», souligne ainsi Magnus Gudmunsson.