L'auteure est une mère de deux jeunes garçons et réside à Candiac. Exceptionnellement, nous avons accepté de préserver son anonymat afin que sa gardienne ne puisse être identifiée. Elle réagit au reportage sur les garderies illégales qui a été publié dans La Presse vendredi dernier.

Encore une fois, les garderies font les manchettes. Encore une fois, j'ai le goût de crier. On parle toujours du désespoir des parents, mais pas assez souvent de leur exaspération!

Tous les gouvernements au pouvoir vantent tour à tour notre fantastique réseau de CPE et tous se ferment les yeux sur le manque de places et la gestion déficiente. On promet des nouvelles places en période électorale et puis tout ce dont on entend parler par la suite, ce sont des ministres peu scrupuleux et de la hausse phénoménale du nombre d'inspecteurs.

J'ai deux garçons en âge de fréquenter les CPE. Je les ai tous deux inscrits alors que j'étais enceinte de trois mois à tous les CPE possibles et imaginables. Et devinez quoi? Je suis environ 467e sur la liste et mes garçons auront une place lorsqu'ils auront 18 ans! Je paie des impôts pour subventionner ce fantastique réseau. C'est un service auquel j'ai droit et auquel je n'ai pas accès. C'est inadmissible.

Mes garçons n'ont donc pas accès à un service de garde de qualité et encadré et je dois débourser plus d'argent. Oui, je reçois un retour d'impôt, mais il est en fonction des revenus familiaux. Tandis qu'en CPE, tout le monde paie sept dollars par jour. Il y a donc une mauvaise répartition des richesses et les plus pauvres paient pour les plus riches qui réussissent à avoir une place en CPE. Il y a peut-être là une piste de solution pour ce service qui coûte si cher... Le coût des places en CPE devrait peut-être également être déterminé en fonction des revenus familiaux.

Il y a également un énorme problème de gestion des listes d'attente. Comme je le disais plus tôt, j'ai inscrit mon premier garçon alors que j'étais enceinte de trois mois. Mais entre temps, nous avons déménagé. Il avait neuf mois quand je me suis dépêchée de l'inscrire sur les listes de notre nouveau quartier. Imaginez où il se retrouve! À quand une liste centralisée?

L'automne dernier, j'ai entendu une ministre dire en entrevue que c'était la responsabilité des parents s'ils envoyaient leurs enfants dans des garderies illégales. Moi, si pacifiste, une grande colère m'a envahie! Comment peut-on être si déconnecté de la réalité?

Ce qui se passe pour vrai, c'est qu'on cherche une place, on prend ce qui arrive et on ferme les yeux sur le Kraft Dinner servi le midi ou les cinq enfants en trop parce que le reste semble correct et que notre enfant a l'air heureux et se développe bien. Il n'y a pas assez de places!

Juste dans mon petit bout de rue, dans les 10 familles voisines, il y a eu cinq naissances en 2010. Il y a deux CPE dans ma ville! On peut les remplir seulement avec les enfants de la rue où nous demeurons!

Si quelqu'un pouvait sortir les statistiques sur le nombre d'enfants de 0 à 5 ans au Québec et le nombre de places en CPE/garderies subventionnées, vous verriez comment le problème est criant. Mais ces chiffres sont toujours absents des discours...

Vous êtes scandalisés par le nombre de plaintes? Moi, je le trouve bas. Nous sommes des milliers de parents à ne pas dénoncer ce qui se passe parce que nous avons besoin de nos places dans notre garderie illégale. Je ne veux pas signer cette lettre parce que je ne veux pas causer de trouble à ma gardienne...

Le gouvernement nous rit au visage en augmentant le nombre d'inspecteurs, en rendant la vie difficile à tous ces gens qui nous sauvent la vie, en nous faisant la morale et en ne faisant absolument rien pour augmenter l'accessibilité au réseau de CPE.