La neige et le froid ont paralysé l'Europe ces dernières semaines, au point où pelles et soldats ont été réquisitionnés pour déneiger les villes. Pendant ce temps, à Montréal, les citadins profitaient des joies de l'hiver et affluaient en nombre record vers les activités hivernales.

Ce contraste saisissant s'explique en bonne partie par la clémence de la météo au Québec. Mais au moment où Montréal en lumière lance ses festivités, aujourd'hui, on peut se demander si les urbains ne sont pas aussi en train de renouer avec l'hiver? Si une nouvelle nordicité assumée ne se pointerait pas le nez gelé à l'horizon?

Remarquez, le désir de s'envoler dans le Sud n'a pas disparu, pas plus que les jurons provoqués par la gadoue et les rues étroites de certains quartiers centraux... Mais la relation amour/haine que les citadins entretiennent avec l'hiver semble néanmoins se rééquilibrer depuis un peu plus de cinq ans. Non seulement les activités hivernales fracassent-elles des records d'affluence, mais elles se tiennent, aussi, en nombre record.

Pour une Fête des neiges qui soulignait sa 29e édition ou une Célébration des tuques bleues qui se tiendra sur le mont Royal pour une 15e année, ce soir, on compte en effet un nombre croissant d'activités récentes. Un phénomène que ne peut expliquer la météo des dernières semaines.

Pensons à la mise sur pied du nouveau village de Noël, sur la place Jacques-Cartier. À la 6e édition du triathlon d'hiver de Ste-Justine. Aux Feux sur glace qui se sont illuminés pour une 7e année. Au demi-marathon hypothermique qui sera couru pour une septième fois, samedi au Parc Jean-Drapeau. Ou à l'Igloofest, qui a électrifié le Vieux-Port pour une 6e année d'affilée le mois passé.

Pensons, surtout, au Village des neiges érigé à coup de blocs et flocons sur l'île Ste-Hélène, certainement l'indice le plus flagrant de ce flirt grandissant entre les citadins et la froide saison. Il s'agit de la première activité d'envergure à se tenir tout au long de la saison, un projet d'inspiration finlandaise comprenant hôtel, spa et restaurant. À lui seul, ce dernier a servi plus de 8000 clients... en un mois à peine!

Ce ne sont que des indices. Mais des indices qui en renforcent d'autres: du nombre de joggeurs dans les rues à l'intérêt porté au vélo quatre saisons, en passant par le déneigement des pistes cyclables, la possibilité de faire rouler les BIXI en hiver et l'intention de tenir, prochainement, une séance hivernale des populaires Piknic Électronik.

Les appels à l'abolition de l'hiver, comme celui du regretté sociologue Bernard Arcand, ne se tairont pas pour autant. Mais la «nordicité mentale» du géographe Louis-Edmond Hamelin semble vouloir faire sortir les Montréalais de leur tanière.

Il est vrai que le temps clément, qui s'inscrit dans une tendance climatique, n'est pas étranger à ce phénomène. Mais il ne peut expliquer à lui seul la décision des élus et des promoteurs de ne plus rayer l'hiver de leur calendrier.

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