Annulée ou pas annulée, la série Pan Am? La question était sur toutes les lèvres, hier après-midi, après un premier tweet de Karine Vanasse annonçant sa fin. «C'est confirmé, un seul épisode de plus en janvier pour Pan Am. J'espère que vous serez là jusqu'à la fin», écrivait-elle sur son compte Twitter. Quelques minutes après cet atterrissage forcé, et toujours sur les ailes de Twitter, Karine se confondait en excuses, expliquant qu'il restait en fin de compte cinq nouveaux épisodes jusqu'en février. Encore une fois, celle qui incarne avec charme et naturel la pétillante Colette Valois laissait entendre que c'était bel et bien la fin de Pan Am. Des journalistes américains aux abois ont immédiatement pris contact avec le réseau ABC. Est-ce que Pan Am est annulée? Non, a tranché un relationniste de ABC. «Rien n'a changé. La production est encore en cours et le sera jusqu'à la livraison du 14e épisode, qui sera diffusé après les Fêtes. Pan Am est encore considérée pour l'an prochain, mais la décision définitive sera annoncée en mai.»

Emportée par l'anticipation médiatique, Karine Vanasse a-t-elle voulu faire atterrir l'avion trop vite? Ou, au contraire, sait-elle des choses qu'ABC sait aussi, mais ne veut pas annoncer officiellement? Difficile à dire.

En attendant, Pan Am et ses hôtesses de l'air traversent une zone de turbulences. Mais, contrairement aux apparences, c'est à la fois un bon et un mauvais signe. Le bon signe, c'est que si ABC avait voulu tirer la «plug» et tuer la série, ce serait déjà chose faite. La série The Playboy Club a été retirée brutalement après trois semaines sans que le diffuseur NBC en fasse un cas de conscience. En comparaison, Pan Am est en bien meilleure position et, de toute évidence, il y a, à ABC, des gens qui militent pour son retour. Son avenir n'en demeure pas moins incertain. Les raisons sont connues.

Après des débuts très prometteurs avec plus de 11 millions de téléspectateurs, la série s'est mise à avoir du plomb dans l'aile, et à perdre de l'altitude et la moitié de son public. Sur des chaînes spécialisées comme HBO ou AMC, qui produit Mad Men, les 5,6 millions de fidèles de la série auraient été accueillis au champagne. Mais Pan Am est diffusée sur ABC, un des trois grands réseaux généralistes américains, avec le prestige, mais aussi la pression financière que cela suppose. Dans un tel contexte, Pan Am est condamnée au succès ou à une mort officielle en mai.

Chose certaine, si la série revient l'année prochaine, un ménage dans les intrigues et les personnages s'imposera. Tiraillée entre trop d'histoires, la série n'a pas pu trouver son foyer et se brancher entre le récit d'espionnage, le cours d'histoire américaine sous Kennedy, le catalogue de voyage et le roman-savon. Autre problème: au lieu de s'en tenir à une ville étrangère par épisode, Pan Am atterrit chaque semaine dans deux ou trois villes européennes. Résultat: on a souvent l'impression que la série va dans toutes les directions. Et puis, malgré la différence de contexte, impossible de ne pas comparer Pan Am avec Mad Men, qui se déroule à la même époque. Or, au jeu boiteux de la comparaison, Pan Am est toujours perdante, ses personnages n'ayant pas la complexité des personnages de Mad Men et ses textes n'ayant jamais atteint la densité dramatique de la série culte dont elle était une sorte de produit dérivé.

Ces réserves mises de côté, Pan Am a aussi de grandes qualités: une ouverture aux autres cultures, une sophistication très européenne, un dispositif visuel et scénique éblouissant et l'audace d'introduire dans les dialogues, semaine après semaine, des répliques en français, ce qui est un exploit en soi. Or, cet exploit n'aurait sans doute pas pu aussi bien passer la rampe sans le talent de Karine Vanasse. On ne répétera pas assez à quel point Karine a réussi à s'imposer et à faire de Colette Valois un personnage touchant, attachant, avec un petit quelque chose qui la distingue des autres. Des quatre hôtesse de l'air de la série, elle est sans doute celle qui a le mieux réussi à tirer son épingle du jeu. Il reste à espérer que son empressement à annoncer la fin de Pan Am sur Twitter ne lui nuira pas trop. Les hauts dirigeants en télévision n'aiment jamais quand on annonce les choses à leur place. Surtout si c'est la vérité.