Un jour, une étude nous dit que la caféine n'est vraiment pas mauvaise pour la santé. Le mois suivant, on affirme l'inverse. Parfois c'est le chocolat qui est sur la sellette ou le vin rouge. Quand j'étais enceinte, on nous avertissait de ne pas trop manger de gros poissons, à cause du mercure. Par contre, en même temps, on ne cessait de les vanter comme sources d'oméga-3.

Se faire une tête en matière d'alimentation est quasi impossible si on se fie uniquement aux recherches qui finissent toujours par dire une chose et son contraire. Surtout quand il est question de grossesses et de bébés (dodo sur le dos, pas sur le dos, de côté, debout et à l'envers tant qu'à y être...)

Plus les années passent, plus les recherches se suivent et plus une seule et unique conclusion s'impose: la modération a bien meilleur goût. Et faire preuve de jugement aussi.

Et c'est exactement ce qui doit être retenu de la dernière recherche britannique affirmant que boire un ou deux verres d'alcool par semaine durant la grossesse ne pose pas de risque particulier.

Une étude faite par une équipe du département d'épidémiologie et de santé publique du University College de Londres et publiée mardi dans le Journal of Epidemiology and Community Health, montre en effet, en analysant les données d'une cohorte de plus de 11 000 enfants, que chez les petits de 5 ans nés de mères qui buvaient de façon modérée alors qu'elles étaient enceintes, il n'y pas de risque plus élevé de problème de comportement ou cognitifs que chez les bambins nés de mères qui n'ont pas pris une goutte durant la grossesse.

Bonne nouvelle?

Oui, expliquait hier midi Dr Diane Francoeur, chef du département d'obstétrique et de gynécologie de Sainte-Justine, à la radio de Radio-Canada. Bonne nouvelle, car la recherche donne des munitions à ceux qui s'opposent aux extrêmes, à la rigidité, au dogmatisme, au tout noir et tout blanc.

Elle permet aux médecins d'entrer dans les nuances. De dire aux femmes de se fier à leur bon jugement, sur fond de modération,sans culpabilité.

Fini les jugements à l'emporte-pièce basés sur des études qui disaient que la moindre goutte pouvait poser un risque et qu'il fallait donc tout arrêter.

Cette étude le confirme, mais on le voyait bien avant, que les risques posés par l'alcool chez la femme enceinte étaient tout à fait gérables de la même façon qu'on arrive à vivre, chaque jour, avec la probabilité de se faire frapper en traversant la rue ou de mourir étouffé par un raisin.

Donc, gérons le risque. Et vivons un peu.

Saviez-vous, a demandé Dr Francoeur, que les obstétriciens-gynécologues se font dire par ceux qui pilotent la profession, de surveiller et d'interroger TOUTES leurs patientes «en âge de procréer» sur leurs habitudes de consommation d'alcool? Pas grave que vous soyez enceinte ou pas. Ce qu'on veut savoir c'est si vous prenez un coup et s'il est possible, théoriquement, que vous tombiez enceinte, car dès lors, on s'inquiète.

Quand est-ce qu'on met toutes les femmes de moins de 50 ans à la la bière sans alcool à l'acide folique, tant qu'à y être? Une multivitamine extra-calcium avec ça?

Entre, d'un côté, les scénarios à la Mad Men où les mères fument et boivent des gin-tonics avec leur bedaine de 6 mois et de l'autre côté, la sobriété totale dopée à la culpabilité prônée par certains médecins, il y a un milieu. Un milieu que bien des femmes connaissent et assument sans problème. Un milieu où on prend un verre de vin une fois de temps en temps. Un milieu que les brûlures d'estomac, les maux de coeur, la fatigue et autres inconforts de la grossesse réussissent aisément, croyez-moi, à garder à l'oeil.

Évidemment, il y a aussi des femmes qui ont des problèmes avec l'alcool et qui, malheureusement, boiront trop pendant leurs grossesses. Une brosse? Mauvaise idée. Pas besoin d'un médecin pour s'en douter. De l'alcool en grande quantité tous les jours? Mauvaise idée aussi. Qu'on soit enceinte ou pas. Drogue? Deuhhhhhh.

Je relisais récemment, dans le cadre des festivités entourant les 50 ans du magazine Châtelaine, un éditorial publié en 1964 par la rédactrice en chef de l'époque, Fernande Saint-Martin, où elle faisait la liste de tous les domaines où, à l'époque, les femmes étaient traitées de façon totalement paternaliste. Elle y parlait de ce désir de la femme d'être présumée «être autonome et responsable». En 2010, les femmes ne le veulent pas moins. Être traitées comme des personnes autonomes et responsables, même enceintes, même devant une bière ou un verre de vin.