Sorry mister Molson: mais ce n'est pas en milieu d'après-midi, hier, par un laconique communiqué qui semblait sortir directement du cabinet National que dirige votre frère Andrew que vous auriez dû tenter de réparer les pots cassés.

Surtout que ce communiqué, à l'image de tout ce que votre organisation a fait dans les minutes qui ont suivi le congédiement de Jacques Martin et la nomination du pauvre Randy Cunneyworth pour le remplacer témoigne d'une improvisation qui est loin d'honorer le Canadien de Montréal. Une organisation qui a déjà été la plus prestigieuse de la LNH. Une organisation qui ne l'est visiblement plus.

En quelques phrases, vous abandonnez votre entraîneur-chef intérimaire et vous faites un autre pied de nez aux partisans outrés de voir un unilingue anglophone derrière le banc de votre équipe. Une équipe qui est aussi un peu la leur.

Je me demande comment Randy Cunneyworth s'est senti lorsque sa femme Jennie lui a appris que sa «permanence au poste d'entraîneur-chef sera réévaluée au terme de la saison et sera soigneusement planifiée.»

Tiens donc! Ça veut dire que sa nomination de samedi ne l'était pas? Remarquez qu'on s'en est bien rendu compte.

Et que dire de votre remarque suivant laquelle «la capacité de votre prochain entraîneur-chef de parler le français et l'anglais sera un facteur très important dans le choix d'un candidat sur une base permanente.»

La capacité de votre «coach» de parler français n'est pas très importante, monsieur Molson. Elle est essentielle. Et le fait que vous ne le reconnaissiez pas dans ce communiqué que vous avez signé est inquiétant.

J'espère que vous n'avez pas payé trop cher les spécialistes des communications qui vous ont servi de pompiers hier. Car, en matière de «Damage Control», ils ont attisé le feu bien plus qu'ils ne l'ont circonscrit.

Mais comme vous semblez habitué de payer du monde à ne rien faire, ou à ne pas en faire assez, il faut croire que ça ne vous dérange pas trop...

Votre présence était essentielle

En passant: pourquoi vous cacher derrière un communiqué encore hier? Pourquoi vous être caché samedi?

Quand le bateau affronte une tempête, une grosse, une vraie, c'est près du timonier qui s'éreinte à maintenir le cap que le capitaine doit se tenir et non dans les chics salons pour partager champagne et amuse-gueules avec les riches passagers pour les rassurer et prétendre que tout va bien. Parce que «by the way» c'est loin de bien aller au sein de votre organisation.

Samedi, c'est sur la tribune de presse, entre messieurs Cunneyworth et Gauthier, que vous auriez dû être pour assumer votre responsabilité quant aux changements mineurs sur le plan du hockey, mais ô combien majeurs sur le plan de l'image de votre entreprise.

Pourquoi pas Gainey?

Parce que je m'en voudrais de simplement me contenter de chialer, ce n'est pas dans ma nature, j'aurais quelques suggestions à vous faire. Je suis d'ailleurs surpris que monsieur Gauthier, en homme de hockey compétent et directeur général avisé qu'il est, n'y ait pas pensé.

Vous auriez pu faire appel à Michel Therrien. Vous vous souvenez de lui? Il a dirigé votre équipe après Alain Vigneault et avant Claude Julien. Il était tout jeune et inexpérimenté lorsque votre équipe lui a donné sa première chance. Il a pris de l'expérience avec les Penguins de Pittsburgh qu'il a mis sur le chemin de la Coupe Stanley. Un Therrien mieux nanti pour faire face à la musique aurait pu rembourser l'équipe qui lui a offert sa première chance. Mais bon! Vous n'avez pas cru bon lui faire signe ne serait-ce que pour savoir si le job l'intéressait. En passant: il aurait dit oui. Je le lui ai demandé pour vous.

Si Michel Therrien ne vous intéressait pas, vous auriez pu vous tourner vers Bob Gainey. Après tout, il est encore sur votre «payroll».

Et Gainey a des dettes à rembourser: au Canadien comme à ses partisans francophones. Car c'est sous son règne que l'abandon du fait français s'est amorcé.

En plus, c'est à Bob Gainey que les partisans du Canadien doivent l'arrivée de Scott Gomez à Montréal: une catastrophe autant sur le plan hockey que sur le plan financier.

C'est à Bob Gainey que l'on doit aussi les trop longs et trop généreux contrats qu'il a fait signer à Michael Cammalleri et Brian Gionta.

Au lieu de le payer comme observateur, conseiller et ambassadeur, il aurait pu prendre la relève derrière le banc. Il l'a déjà fait. Il a des compétences certaines. En plus, il parle français.

Mais bon! Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué.

En terminant, je m'en voudrais de ne pas souligner une mesure importante que vous avez prise pour redonner aux partisans francophones un sentiment d'appartenance. Vous avez mis les chansons de U2 si chères à votre ancien vice-président responsable du marketing en sourdine au profit de succès francophones.

Je vous en ai déjà remercié. Je le fais encore ce matin. J'aimerais simplement ajouter que ce serait bien de ne pas se contenter de quelques rigodons. Que ce serait «très important» pour reprendre vos propres mots d'avoir aussi quelques joueurs et un entraîneur-chef capables de nous parler sans avoir recours à une traduction simultanée ou à des sous-titres.

Le tout soumis respectueusement...

Photo: Alain Roberge, La Presse

Geoff Molson