Dix mois après avoir lancé un appel à tous sur Twitter afin de recueillir du financement, Nicolas Langelier, l'ex-rédacteur en chef du magazine P45, dévoile finalement son Nouveau Projet, un magazine qui sera publié deux fois l'an et qui n'est pas sans rappeler le Monocle de Tyler Brûlé. Le magazine compte déjà 500 abonnés qui sont embarqués dans l'aventure avant même d'avoir vu ne serait-ce qu'un sommaire. Ce premier numéro (un événement en soi en ces temps difficiles pour le papier!) est le fruit des réflexions du comité éditorial, composé d'une douzaine de personnes. Mais c'est surtout l'oeuvre de Nicolas Langelier, qui porte le projet à bout de bras, et de son associé dans cette aventure, le professeur de philosophie de l'Université Laval Jocelyn Maclure.

Pour ce numéro historique, les deux éditeurs proposent une réflexion autour du thème «survivre au 21e siècle», décliné autour du travail, de l'économie et de la culture. «On sent vraiment qu'il y a un désir pour quelque chose de différent, confie Nicolas Langelier. On a l'ambition de faire avancer la société avec des idées nouvelles, de proposer une tribune pour réfléchir et échanger, un peu comme le faisait Cité libre dans les années 1950-1960. Je ne veux pas me comparer à eux en terme d'importance, mais j'aimerais bien qu'on devienne nous aussi un lieu de débat.»

Publication touffue

Ne cherchez pas des textes d'humeur signés par des journalistes-vedettes dans cette première livraison, ce n'est pas du tout l'esprit de Nouveau Projet. Il s'agit plutôt d'une publication touffue qui propose plusieurs pistes de réflexion sous forme de courts essais. Deux exemples: la mère indigne Caroline Allard réfléchit aux jouets éducatifs tandis que le duo Joseph Heath et Andrew Potter, auteurs de La révolte consommée, prend position en faveur de la «Slow Politics».

On peut aussi y lire un entretien avec le philosophe Charles Taylor et une analyse de la série télévisée Mad Men par le professeur Daniel Weinstock. Nouveau Projet publiera à l'occasion des traductions de textes importants. Dans ce numéro, on peut donc lire la prose magnifique de Joan Didion et les réflexions du journaliste Nicholas Carr, une référence aux États-Unis.

Alors que l'industrie des médias ne jure que par le web et le numérique, Nouveau Projet n'a pas l'intention d'investir beaucoup dans son site web et travaille sans urgence à développer une application iPad. Le site présentera des extraits des textes qu'on pourra acheter à l'unité, mais il n'y aura pas possibilité de laisser un commentaire.

Ce n'est pas un peu paradoxal pour une publication qui veut être un lieu d'échange? «Je regarde ce qui se dit sur le web et franchement, je ne trouve pas ça d'une grande utilité, observe l'éditeur-rédacteur en chef. Ce n'est pas là que se font les débats. J'ai plutôt envie de développer des événements qui, sans être des colloques, seraient des lieux pour parler et échanger.»

Nicolas Langelier compte bien s'inspirer du modèle financier de Monocle et développer des projets dérivés afin de rentabiliser son aventure. Nouveau Projet publiera donc une collection de courts essais dont le premier - portant sur l'économie - sera lancé ce printemps. «Éventuellement, on pourrait produire une baladodiffusion hebdomadaire avec des collaborateurs de la publication et des invités. Ce serait une façon de se rattacher à l'actualité puisque nous ne publions que deux numéros par année.»