Le poète italien Andrea Zanzotto, considéré comme l'un des plus importants du XXe siècle, est mort mardi à l'âge de 90 ans dans un hôpital où il se trouvait depuis quelques jours près de Trévise (Vénétie), sa région natale, a-t-on appris de source hospitalière.

Le poète, qui souffrait de problèmes cardiaques et respiratoires, avait  fêté son anniversaire le 10 octobre dans sa maison de Pieve di Soligo, sur les collines entourant Trévise.

«Qu'est-ce qu'on comprend de la vie après 90 ans? Rien», avait-il alors déclaré à un journaliste de la rédaction régionale de la télévision publique Rai 3. «Pour dire des mots qui valent la peine, il faudrait avoir au moins 900 ans», avait-il ajouté.

En adressant ses condoléances «à son épouse et ses enfants», le président de la région Vénétie Luca Zaia a regretté «la disparition d'un grand homme, d'une immense personnalité de la culture internationale», évoquant «l'un des esprits libres de la Vénétie, un poète qui laisse une marque indélébile».

M. Zanzotto, né à Pieve di Soligo, près de Trévise, avait obtenu sa maîtrise de Lettres en 1942 à Padoue. Il avait commencé à enseigner dès l'âge de 16 ans. Après la seconde guerre mondiale, il avait séjourné en France et en Suisse avant de revenir dans son village natal.

Selon l'encyclopédie Universalis et le Centre international de poésie de Marseille, il avait reçu en 1950 le Prix San Babila décerné par un jury où siégeaient Giuseppe Ungaretti, Salvatore Quasimodo et Eugenio Montale.

Il fait paraître son premier recueil de vers d'inspiration hermétique, Derrière le paysage, chez Mondadori en 1951. Vont suivre Vocatif (1957), IX Eglogues (1962), La Beauté (1968) et Pâques (1973).

Avec IX Eglogues, il rompt avec la tradition de la poésie pastorale pour se faire l'écho de la vie urbaine et du monde industriel.

Cette poétique nouvelle, s'écartant de l'hermétisme des débuts, est révélée à un public plus vaste par La Beauté (La Beltà). Zanzotto y prend acte de la désagrégation de toute forme idéale que désigne le terme de «beltà», au contraire du plus concret «bellezza».

Alors qu'il entreprend le tournage de Casanova, Federico Fellini sollicite Andrea Zanzotto et lui demande de composer des vers en dialecte vénitien. Ce sera l'occasion pour lui d'écrire notamment la chanson Cantilène londonienne.

Cette expérience engage plus avant Zanzotto dans l'usage de ce «plurilinguisme» (capacité de passer du babil enfantin au calembour en passant par la citation érudite) qu'on lui reconnaît depuis.

Il bâtit notamment une trilogie - Le Galatée au bois (1978), Phosphènes (1983), Idiome (1986) - considérée comme «la synthèse des trois grandes traditions poétiques italiennes»: celle de Dante, celle de Pétrarque et la dialectale.

L'écrivain Pier Paolo Pasolini, qui fut un de ses amis proches, avait écrit à propos des lecteurs de Zanzotto qu'ils étaient «mis dans un état ''d'estrangement'' de (leurs) habitudes sans précédent».